Commentaire d’arrêt tc 19 janvier 2004

TC, 19 Janvier 2004, CLPK c/ Aéroport de Paris

Un organe « X » a-t-il compétence dans une matière « X »? C’est là que repose tout le problème de l’arrêt du Tribunal des conflits datant du 19 janvier 2004. En effet, cette juridiction a due régler un litige de deux ordres. Le premier étant relatif à l’éventuelle existence d’une voie de fait et le second concernant l’ordre juridictionnelcompétent en la matière. Mais qu’est ce qu’une voie de fait? La voie de fait est un fait de l’administration qui porte matériellement et illégalement une atteinte grave à une liberté fondamentale ou à un droit de propriété, et qui n’entre pas dans ses pouvoirs.
Dans l’arrêt susvisé, il est question d’une compagnie aérienne, Air Lib, qui s’est vue privée temporairement de l’utilisation de ses avions. Cettedécision émanant de l’administration d’Aéroport de Paris est une réponse au refus de paiement des redevances aéroportuaires que devait la compagnie. Le litige étant remonté devant le tribunal des conflits, c’est donc à lui de trancher les questions qui s’y rattachent. Lesquelles étant de savoir s’il y a eu effectivement voie de fait et, par conséquent, quelle juridiction est compétente en lamatière.
Nous verrons pour répondre à ces interrogations que la voie de fait répond à des critères strictes. Ceux-là n’étant pas réunis, la voie de fait ne peut légitimement être affirmée (I). Cet acte d’affirmation peut être de la compétence des ordres de juridiction. Mais la compétence du juge administratif ne va pas plus loin dans la majeure partie des cas (II).

Une voie de fait infondéeAfin de réagir au refus de paiement des redevances aéroportuaires émanant de la Société CLPK Aircraft Funding, Aéroport de Paris a pris une mesure de rétention de deux des aéronefs appartenant à cette première. Cette décision administrative est, de toute évidence, contestée et dénoncée par la compagnie Air Lib (Société CLPK) qui prétend faire face à une voie de fait (A). Toutefois, il seraitjudicieux d’étudier les moyens exposés afin de nous apercevoir si nous sommes réellement en présence d’une voie de fait (B).

A) Une décision administrative controversée

De toute évidence, l’Aéroport de Paris est une administration car elle répond à des besoins d’intérêt général. Les compagnies d’aviation civile, quant à elles, ne sont pas nécessairement des personnes publiques. Toutefois, afinde mener à bien le service public d’aviation, ces deux entités doivent collaborer. Cette collaboration se faisant par l’intermédiaire d’un contrat administratif qui se justifie par la présence d’au moins une personne publique (CE, 1963, Société Interlait). Cette condition organique est parfaitement rempli en l’espèce par la présence d’Aéroport de France. Comme tout contrat, le contrat administratiffait naître des droits comme des obligations. Ainsi, l’obligation de l’un constitue nécessairement le droit de l’autre et réciproquement.
En l’espèce, l’objet du litige est la redevance aéroportuaire. En effet, un aéroport quel qu’il soit met à disposition des compagnies des ouvrages, des installations, des bâtiments, des outillages,… En échange de se service, les compagnies d’aviationdoivent reverser une allocation pécuniaire, appelée dans ce contexte redevance aéroportuaire.
Comme nous l’avons vu précédemment, le litige qu’est présenté au Tribunal des Conflits est issu d’un refus de paiement de ces redevances provoquant une mesure de l’administration que le débiteur estime abusive. Mais si nous considérons l’article R. 224-4 du Code de l’aviation civile qui déclare que « lesredevances sont dues par le seul fait de l’usage des ouvrages, installations, bâtiments et outillages qu’elles rémunèrent. En cas de non paiement de redevances dues par l’exploitant de l’aéronef, l’exploitant de l’aérodrome est admis à requérir de l’autorité responsable de la circulation aérienne sur l’aérodrome que l’aéronef y soit retenu jusqu’à consignation du montant des sommes en litige »,…