Étude de texte pour en finir avec le jugement deleuze

Dans une lettre à Arnaud Villani datée du 29 décembre 1968 Gilles Deleuze écrit : « Je crois qu’un livre, s’il mérite d’exister, peut-être représenté sous trois aspects rapides. On n’écrit de livresdignes que 1. Si l’on pense que les livres sur le même sujet ou sur un sujet voisin tombent dans une sorte d’erreur globale (fonction polémique du livre) ; 2. Si l’on pense que quelque chosed’essentiel a été oublié sur le sujet (fonction inventive) ; 3. SI l’on pense être capable de créer un nouveau concept (fonction créatrice). Bien sûr c’est le minimum quantitatif : une erreur, un oubli, unconcept… Dès lors je prendrais chacun de mes livres, en abandonnant la modestie nécessaire, et je me demanderai : 1. Quelle erreur il a prétendu combattre ; 2. Quel oubli il a voulu réparer ; 3. Quelnouveau concept il a crée… ».
Sachant que de telles inquiétudes sous-tendent la pensée deleuzienne, on ne saurait envisager d’aborder un de ses textes sans tenter de répondre à ses questionnements.Ainsi dans Critique et Clinique le chapitre intitulé Pour en finir avec le jugement semble avoir une position particulière qui justifie qu’on lui applique les intentions et attitudes généralement portéesà un plus vaste ensemble. L’ouvrage de Deleuze s’intéresse en effet à la littérature, à ses moyens d’opérer et de produire des affects, à la langue hors langue qu’elle produit, à l’expérience qu’elleconstitue. Or, mis à part le fait que le titre reprend l’oeuvre radiophonique d’Antonin Artaud Pour en finir avec le jugement de Dieu et fait référence à des écrivains, le propos de ce chapitre neporte pas sur les thèmes abordés dans le reste de l’ouvrage, d’où sa singularité partielle et son autonomie.
Pourtant c’est en suivant un parcours rigoureux que Deleuze en vient à l’insérer ici. Lesdifférents textes regroupés ici sont à l’origine écrits séparément. L’unité n’est de l’ouvrage n’est donc pas une donnée première. Qu’est ce qui justifie en ce sens l’insertion de ce texte…