Don juan ou les amants chimériques
Michel de Ghelderode, Don Juan ou les amants chimériques (1926)
Il s’agit d’une pièce de jeunesse, « un drama-farce pour le music-hall » dédié à Charlie Chaplin et remanié à plusieurs reprises.
Unsoir de carnaval, un homme, déguisé en une sorte de Don Juan décrépi, échoue dans un bar appelé Babylone. Il n’y trouve que des épaves jusqu’à découvrir Olympia dont il tombe amoureux. Malgré lesefforts de quatre clients, il passe la nuit avec elle mais reste insatisfait. Le lendemain Olympia est tuée. Arrive alors la vraie Olympia, couverte de gaze, qui révèle à Don Juan que la morte n’était qu’unmannequin. Elle l’incite à l’épouser moyennant de l’argent. Après la déclaration d’amour de Don Juan, elle s’effondre, morte, et on découvre, derrière la gaze, une vielle femme. Tous les comparsesn’étaient en réalité que des figures de carnaval. La pièce se conclut par l’arrivée d’un homme vert, ancien Don Juan, qui prévient son « collègue » des dettes contractées, avant de montrer son visage desyphilitique.
Le théâtre de Ghelderode opère la synthèse entre une certaine tradition (notamment dans le traitement du temps) et la modernité théâtrale. Les lumières, les sons rendent l’oeuvrebaroque, tandis que, par certains côtés, elle touche au théâtre de l’absurde. C’est un théâtre anti-intellectuel total, de l’instinct et de la démesure.
Le paratexte est intéressant dans la mesure où ilreprésente une sorte de programme:
le sous-titre: « Les amants chimériques »: chimériques signifie impossibles, imaginaires; en effet Don Juan ne réussira à avoir aucune relation sexuelle dans la pièce,le genre: « Drama-farce pour le music hall »:
ce choix est dans la logique du grotesque que le dramaturge veut mettre en oeuvre pour démystifier les grandes figures (comme dans La mort du docteurFaust): drama-farce implique en effet les notions de drame et de farce, de terrible et de comique,
comme Marinetti, Ghelderode pensait qu’il était nécessaire de recourir au music-hall pour régénérer…