Le pouvoir de l’argent

Dissertation français
LES POUVOIRS DE L’ARGENT
• Comment Marx s’efforce-t-il de démontrer « que ce que je suis et ce que je peux n’est nullement déterminé par mon individualité »?
• Mais à quelle(s) condition(s)?
• Marx se fait-il l’apologiste, dans ce texte, de cette ou ces citations?
• Que cherche-t-il à faire apparaître?
• En quoi ce texte présente-t-il un intérêt proprementphilosophique

Cet extrait des Manuscrits de 1844 de Marx fait une critique sévère de l’argent et de la place qu’il occupe dans nos sociétés faisant de l’homme un objet de consommation. C’est donc la notion de propriété sous-jacente qui est critiquée et nous interroge notamment sur le rapport de l’argent à l’être, à l’individualité et à l’esprit. Ainsi le texte s’articule en trois moments logiques qui nousfourniront les trois moments du commentaire : l’étantité de l’argent et sa négation de l’individualité (1ère partie : du début du texte à « Donc je ne suis pas laid, car l’effet de la laideur, sa force repoussante, est anéanti par l’argent »), l’argent nouveau Souverain bien des temps modernes (2nd partie : de « De par mon individualité, je suis perclus » à « comment son possesseur pourrait-il nepas avoir d’esprit ? ») ; enfin le miracle de l’argent et l’« objet-isation » de l’esprit (3ème partie : de « De plus, il peut acheter les gens spirituels et celui qui possède la puissance sur les gens d’esprit » à la fin de l’extrait).

L’argent, qui possède la qualité de pouvoir tout acheter et tout s’approprier, est éminemment l’objet de la possession. L’universalité de sa qualité en fait latoute-puissance, et on le considère comme un être dont le pouvoir est sans bornes. L’argent est l’entremetteur entre le besoin et l’objet, entre la vie et les moyens de vivre. Mais ce qui sert de médiateur à ma vie médiatise aussi l’existence des autres pour moi. Pour moi, l’argent, c’est autrui.
Shakespeare décrit parfaitement la nature de l’argent. Pour le comprendre, commençons d’abord parexpliquer le passage de Goethe :
Ce que je peux m’approprier grâce à l’argent, ce que je peux payer, c’est-à-dire ce que l’argent peut acheter, je le suis moi-même, moi le possesseur de l’argent. Telle est la force de l’argent, telle est ma force. Mes qualités et la puissance de mon être sont les qualités de l’argent ; elles sont à moi, son possesseur. Ce que je suis, et ce que je puis, n’est doncnullement déterminé par mon individualité. Je suis laid, mais je puis m’acheter la plus belle femme ; aussi ne suis-je pas laid, car l’effet de la laideur, sa force rebutante, est annulée par l’argent. Je suis, en tant qu’individu, un estropié, mais l’argent me procure vingt-quatre pattes ; je ne suis donc pas estropié ; je suis un homme mauvais, malhonnête, sans scrupule, stupide : mais l’argentest vénéré, aussi le suis-je de même, moi qui en possède. L’argent est le bien suprême, aussi son possesseur est-il bon ; que l’argent m’épargne la peine d’être malhonnête, et on me croira honnête ; je manque d’esprit, mais l’argent étant l’esprit réel de toute chose, comment son possesseur pourrait-il être un sot? De plus, il peut s’acheter des gens d’esprit, et celui qui en est le maîtren’est-il pas plus spirituel que ses acquisitions? Moi qui, grâce à mon argent, suis capable d’obtenir tout ce qu’un cœur humain désire, n’ai-je pas en moi tous les pouvoirs humains? Mon argent ne transforme-t-il pas toutes mes impuissances en leur contraire?
Si l’argent est le lien qui m’unit à la vie humaine, qui unit à moi la société et m’unit à la nature et à l’homme, l’argent n’est-il pas le lien detous les liens? Ne peut-il pas nouer et dénouer tous les liens? N’est-il pas, de la sorte, l’instrument de division universel? Vrai moyen d’union, vraie force chimique de la société, il est aussi la vraie monnaie « divisionnaire ».
Shakespeare signale surtout deux propriétés de l’argent :
1. Il est la divinité manifestée, la transformation de toutes les qualités humaines et naturelles en leur…