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Confrontés à une maladie nouvelle, comment devons-nous mener l’enquête qui en identifiera la cause et aboutira à un traitement ? Les progrès scientifiques et médicaux réalisés depuis une vingtaine d’années à l’occasion de l’épidémie de sida permettent de mieux appréhender la logique de la démarche scientifique, étape par étape. On constatera aussi qu’il ne suffit pas de comprendre pour soigner :les premières étapes de la recherche furent rapidement réalisées, mais on attend encore un traitement définitif ou un vaccin.
» sur Internet ÉTAPE 1 : 1981, APPARITION D’UN SYNDROME MYSTÉRIEUX ET MORTEL
La définition même de maladie nouvelle est problématique car, pour qu’une maladie soit identifiée comme nouvelle, il faut avant tout qu’elle attire l’attention.
Le sida a pu êtreidentifié grâce à un outil de surveillance unique, le réseau américain des Centers for Disease Control (C.D.C.). Ces centres avaient remarqué, dans le courant de l’année 1981, une augmentation de la consommation d’un antibiotique peu employé, utilisé pour le traitement d’une infection pulmonaire rare, la pneumocystose. Cette maladie ne frappait jusque-là que des personnes dont les réponses immunitairesétaient perturbées, dans des situations bien particulières : certaines leucémies ou au cours des traitements employés lors d’une greffe d’organe par exemple.
On aurait pu conclure simplement à l’existence d’une « nouvelle » variété agressive de pneumocystose si tous les patients n’avaient été des hommes jeunes, sans traitement ou maladie connue pour provoquer un déficit immunitaire. Leschercheurs purent rapprocher les cas de pneumocystose de ceux d’autres patients souffrant d’infections inhabituelles, ou d’une forme extrêmement rare de cancer, le sarcome de Kaposi. Finalement, l’élément le plus surprenant, qui a attiré l’attention médicale et marqué les esprits était l’homosexualité des patients. Cet élément utile à la reconnaissance des premiers cas de sida ne constituait pas enlui-même un facteur biologique capable d’expliquer directement cette maladie. Il fallait donc rechercher un élément qui soit à la fois nouveau, répandu dans les communautés homosexuelles et capable de perturber le fonctionnement du système immunitaire. Le nombre de pistes possibles était fort élevé.
La signification même du terme sida, choisi à l’époque, marque cette incertitude : syndromed’immunodéficience acquis. La traduction pourrait être « un manque d’immunité qui n’est pas héréditaire ». Une définition construite sur un manque et une négation ! La nature exacte de ce qui manque dans la fonction immunitaire reste encore mystérieuse aujourd’hui. Certes le sida s’accompagne d’une diminution du nombre de certains globules blancs, les lymphocytes CD4. Mais cette baisse est-elle une causeou une conséquence de la maladie ?
» sur Internet ÉTAPE 2 : 1982, LE SIDA EST UNE NOUVELLE MALADIE INFECTIEUSE
L’hypothèse d’une maladie infectieuse faisait déjà son chemin. Les homosexuels étaient fréquemment touchés par des maladies à transmission sexuelle, surtout lorsqu’ils avaient des partenaires multiples. Dès 1982, la description des premiers cas de sida chez les hémophiles (sujets àde fréquentes transfusions sanguines) et chez les toxicomanes par voie veineuse, et l’identification dans certains cas du patient à l’origine de la contagion permirent de confirmer l’origine infectieuse de la maladie et de préciser ses modes de transmission : le sang et les relations sexuelles. Il restait à identifier le où les agents responsables.
Le premier indice fut l’existence de cas desida chez des hémophiles qui avaient reçu des produits sanguins filtrés. Le micro-organisme responsable de la maladie était donc plus petit que les pores du filtre utilisé : il s’agissait donc très vraisemblablement d’un virus. Tous les virus connus susceptibles d’être transmis par voie sanguine ou par voie sexuelle ont alors été soupçonnés car une variation d’un virus déjà connu aurait pu lui…