Bac blanc
Bac blanc de français
Bernadette Touron & Michel Balmont – 2005
Objet d’étude : le biographique
Question [4 points] Relevez et analysez précisément de quelles manières différentes Blaise Cendrars présente la vie et le personnage de Jean Galmot.
Écriture [16 points] 1. Commentaire Vous ferez le commentaire de la fin du texte, depuis « Ce garçon de bonne famille » jusqu’à la fin. 2.Dissertation Le propre d’un roman historique, biographique ou autobiographique est de mêler le réel et la fiction. Les personnes historiques, modifiées pour l’occasion, y croisent des personnages imaginaires et ont avec eux de longues discussions, les événements effectivement survenus se trouvent situés au milieu d’actions inventées. Trouvez-vous ce mélange intéressant ou attendez-vous d’un « récitde vie » qu’il se conforme à une exigence de vérité ? Vous répondrez à ces questions en un développement composé illustré d’exemples précis empruntés aux « récits de vie » que vous avez étudiés ou lus personnellement. 3. Écriture d’invention En 1919 Jean Galmot, venu rencontrer le patron de Blaise Cendrars, discute avec ce dernier en attendant l’heure de son rendez-vous. Blaise, dans sa curiositéinsatiable, lui pose de nombreuses questions sur sa vie, ses affaires, sa politique. Imaginez et rédigez ce dialogue.
Dans un livre publié en 1930, Rhum, le romancier Blaise Cendrars, raconte/recrée la vie de Jean Galmot, personnage historique qu’il a d’ailleurs réellement rencontré.
Jean Galmot. La vie d’un homme ! Par quel bout commencer ? Je l’ai rencontré en 1919 1 . Je n’étais pas sansconnaître la légende de Jean Galmot. On n’a pas vécu comme moi durant des années dans les coulisses du monde des affaires, dans ce que j’appelais vers la fin de la guerre la bohème des finances (c’est d’ailleurs tout ce qui restait à ce moment-là du Quartier latin) sans connaître son Paris. J’entends par là non pas, tenu à jour, le Bottin des couchages mondains, mais les secrètes combinaisonsdes démarcheurs et des banques qui portèrent soudainement au pinacle du populaire ou vouèrent à la géhenne publique des affaires telles que la liquidation des stocks américains, le consortium international des carbures, la spéculation sur les mistelles, le marché Sanday, la Royal Dutch, le scandale des changes et de la Banque Industrielle de Chine 2 . Et Jean Galmot ? Quelle légende ! En 1919, JeanGalmot passait pour avoir des millions. Des dizaines ou des centaines ? Je n’en savais rien. Mais il avait du rhum ! De quoi remplir le lac Léman ou la Méditerranée ! Il avait aussi de l’or, en poudre, en pépites, en barres ! Comme tous les profiteurs, les spéculateurs, les nouveaux riches de France achetaient des châteaux, on en attribuait des douzaines à Galmot. C’était une espèce de nabab, degospodar 3 , qui faisait une noce à tout casser et qui avait plus de femmes que le Grand Turc ! Qui était-il ? Un aventurier, député. D’où sortait-il ? De la Guyane. Et les potins d’aller bon train. Comme il fréquentait volontiers les salles de rédaction et qu’il aimait à s’entourer d’écrivains et d’artistes, on se chuchotait des infamies sur son compte. C’était un ancien pirate, il s’était faitproclamer roi chez les Nègres, il avait assassiné père et mère. C’était encore un brasseur d’affaires, un bourreau de travail, le plus dévoué des amis, un homme impitoyable, un bluffeur, une brute, un dépravé, une poire, un vaniteux, un ascète, un orgueilleux qui voulait épater Paris, un noceur, un homme épuisé, un costaud qui se produisait dans les foires et luttait en public avec sa maîtresse,un ancien bagnard. On m’a même affirmé qu’il était tatoué ! […] Je m’y attendais. Un beau jour, j’eus Galmot lui-même au bout du fil : il demandait rendezvous au patron. Quand je le vis entrer dans mon bureau, j’eus l’impression de me trouver en face de Don Quichotte.
1 Cendrars travaillait à l’époque dans un journal. 2 Cendrars fait allusion ici à différentes affaires financières louches de…