Camus et sartre: une relation tumultueuse
Camus / Sartre
En quoi l’engagement diverge-t-il chez Camus et Sartre ? Jusqu’où doit-il aller ? Quelle est la responsabilité de l’écrivain ?
Sartre et Camus ont écrit sans se connaitre lesœuvres qui les ont rendus célèbres. Il y avait sans doute suffisamment de points communs entre eux pour que Sartre exprimât son estime pour L’Etranger, Camus son intérêt pour La Nausée et Le Mur. Mais onn’imagine pas de visions du monde plus opposées que celle de Sartre, assombrie par une horreur profonde de la nature, et celle de Camus, ensoleillée par l’amour de la Méditerranée. L’amitié difficilequi a uni les deux écrivains après la Libération n’a jamais empêché Camus de prendre ses distances vis-à-vis de l’existentialisme de Sartre. Leur rupture, qui fit un grand bruit en 1952, marquaitsans doute la divergence des choix politiques, Sartre éprouvant de plus en plus de sympathie et Camus de plus en plus d’horreur pour le communisme soviétique. Mais elle consacrait surtout le divorceentre deux conceptions de l’existence et de la littérature: humanisme, révolte, goût du bonheur, amour de la « belle forme » chez Camus; engagement politique, révolution, obsession de la culpabilité,dégoût de la « littérature » chez Sartre. Si l’on trouve au-delà de toutes ces divergences une certaine unité entre leurs œuvres respectives, c’est dans l’horizon même de ces années, qui leur était communet qu’ils ont contribué à dessiner. On peut ainsi s’expliquer que l’existentialisme n’ait guère débordé le cadre d’une génération, et qu’il n’ait pas eu la fécondité littéraire dont avait fait preuve,vingt ans plus tôt, le surréalisme. Ces maître à penser ont eu des élèves, mais pas de postérité. […]
S’il apparaît que l’existentialisme, en 1970, a perdu son pouvoir stimulant, il est évidemmenttrop tôt pour délimiter son importance historique. Mais il semble être mésestimé, comme l’était le surréalisme en 1945. S’il a cessé d’exercer son influence, c’est qu’elle a été assimilée par les…