Colle critique d’art
LA CRITIQUE D’ART
L’apparition critique d’art est souvent corrélée au développement d’une « rationalisation » de la réception esthétique, qui fait de l’art un domaine autonome, avec des prétentions propres. De même que l’on dit qu’une oeuvre d’art qui ne serait jamais regardée perdrait son statut d’oeuvre d’art, on peut soutenir qu’il en va de même pour une oeuvre dont personne ne parlerait.Or la critique d’art est une forme de jugement esthétique qui se distingue par sa responsabilité : le critique est qualifié et a le devoir de prononcer un jugement juste, en tant que guide du goût. En cela, la critique d’art joue donc un rôle essentiel dans la mise en valeur des oeuvres puisqu’elle s’emploie à apprécier leurs qualités. Le fait de conférer une certaine autorité à des hommesqualifiés pour faire part de leur opinion rationalisée et argumentée sur une oeuvre a donné à ces critiques un statut de médiateur entre l’art et le public. Ce rôle est d’autant plus important de nos jours que l’art contemporain donne lieu à des oeuvres difficiles d’accès, soulignant d’autant plus la nécessité de recourir à ces « guides du goût ». Cependant, cette expression met déjà en évidence lesapparents paradoxes inhérents à l’existence d’une critique d’art. En effet comment donner une légitimité à l’autorité de ces critiques sans sembler vouloir instaurer une norme arbitraire du goût coupant court à toute possibilité de discussion ? Par ailleurs, le critique d’art est confronté à sa propre subjectivité qui fait que le résultat de son examen sera nécessairement un jugement réfutable. Or dansce cas là, il paraît problématique de lui conférer une certaine autorité. De plus, le problème de la critique touche aussi à la communicabilité de l’oeuvre d’art : en effet, par essence, l’oeuvre d’art est abstraite, et donc difficilement réductible au langage. Dans ces conditions, le critique doit atteindre la transcendance de l’art avec la pesanteur du langage. On voit ainsi que la critiqued’art met en abîme un certain nombre de paradoxes philosophiques de l’art.
Nous allons voir en quelle mesure le but de la critique est de transcender la subjectivité, ce qui la porte à être confrontée aux principales problématiques philosophiques liées à l’art.
Dans un premier temps, nous verrons que le rôle du critique est bien de permettre au spectateur de transcender sa réception spontanée.Puis nous demanderons en quelle mesure la nécessité pour le critique de transcender sa propre subjectivité est un obstacle ou un atout.
Enfin, nous verrons que la critique d’art doit dépasser sa subjectivité dans sa forme même pour pouvoir atteindre par les mots le degré d’abstraction de l’oeuvre d’art.
La réflexion que la critique d’art impose à la réception spontanée d’une oeuvre d’artcontribue à donner dans l’opinion commune une mauvaise image du critique, comme dictateur du bon goût, tyran instaurant une norme arbitraire de la beauté. Cette vision est renforcée par une autorité parfois exacerbée de la critique d’art, dont peut dépendre le devenir d’une oeuvre ainsi que celui de l’artiste et conduit à rappeler la subjectivité de la beauté, résumée par cette phrase prêtée àOscar Wilde « la beauté est dans les yeux de celui qui regarde ». De même, Jauss dans Pour une esthétique de la réception, décrit la révolution qui s’est opérée dans l’art et qui consiste à ne plus considérer le critère du beau comme transcendant, et intrinsèque à l’oeuvre, mais comme dépendant de la réception. Ainsi ce serait le récepteur qui ferait l’oeuvre, de son jugement dépendrait la qualité del’oeuvre. En ce cas, la légitimité de la critique d’art est à l’épreuve, puisqu’elle est vue comme une entrave à la liberté du goût et de la contemplation esthétique.
Pourtant l’importance du rôle du critique d’art se manifeste de plus en plus de nos jours, en un temps où on ne saurait apprécier les oeuvres contemporaines sans explications sur leur contexte, leur sens, leur histoire….