Commentaire « juste la fin du monde »
Juste la fin du monde, la pièce de jean Luc Lagarce s’inscrit d’emblée sous l’égide du questionnement . Aller voir juste la fin du monde, tout de même, ce n’est pas rien ! Qu’est ce donc que cettechronique d’une mort annoncée, qui se relativise d’elle-même dans le titre avec une désinvolture désenchantée, et désarmante ?
20h30. Depuis la scène, impassible , installée dans un fauteuil, unevieille femme toise le public de toute sa raideur bourgeoise. La mère de Louis. Le bruissement des voix s’amenuise dans l’attente d’une énigmatique apocalypse..L’histoire est simple : Louis revientdans sa famille pour lui annoncer sa mort prochaine, dans ce qui semble être l’ultime tentative d’un homme éreinté par l’angoisse et la solitude de choisir son destin.. Mais rien ne sera dit. Devociférations en balbutiements, d’engueulades convulsives en réconciliations pudiques , la parole se cherche, se transmue sans cesse, trébuche. Dans cette pièce éminemment agonistique Jean Luc Lagarce évoquesubtilement la difficulté de dire l’amour, le manque et met en scène des personnages complexes, en proie au doute, à l’angoisse, à la difficulté à être et à se faire comprendre. Le message de J-LLagarce se trouve au-delà des mots qui ne sont qu’une feinte pour combler le silence, se donner l’illusion d’être encore en vie. Finalement , cette langue, profuse et heurtée, nous parle du silence et dela mort.
Alors l’appareil scénique prend le relai et nous fait signe, par détour.. Les cartes postales étalées sur le devant de la scène, seul lien, dérisoire, avec le frère absent,nous rappellent sans cesse , comme un emblème, l’écart, l’absence et l’incommunicabilité qui sont le lot de chaque famille, de chaque individu .Michel Raskine met brillamment en scène la paroleincantatoire et déroutante de Lagarce. : la scène s’avance dans le public, dévore l’espace comme pour signifier une identité entre les personnages et les spectateurs. Une autre fois, les yeux rivés…