Culture et politique dans la france des lumières
Cottret M., Culture et politique dans la France des Lumières (1715-1792), Paris, Armand Colin, 2002
Chapitre 1 : Un souffle nouveau
Chapitre 2 : Continuités et normalisation
Chapitre 3 : Confort, confiance et modération
Tout commence bien pour Louis XV avec Fleury jusqu’en 1743. Le jeune roi est pacifiste et Fleury maintient l’alliance anglaise, la guerre de succession de Pologne(1733-38) à laquelle elle ne participe presque pas lui assurera la possession de la Lorraine et en 1739, le budget est enfin équilibré. Les nouveaux concepts d’équilibre et de modération renvoient le prince à l’exercice modéré du pouvoir.
Serait-ce enfin le triomphe de la modération, symbolisée à l’international par la notion d’ « équilibre européen » (lors du congrès d’Utrecht en 1713) quiaurait glissé dans le champ de la politique intérieure ?
La 1ère partie du XVIIIe siècle réalise la fusion entre la modération, vertu privée et vertu publique.
Le bien aimé (pp 57-61)
1) Une conjoncture favorable
Le roi bénéficie d’un amour incontestable de son peuple car il incarne la figure du renouveau dans une monarchie dont la succession est désormais assurée.
En plus del’équilibre budgétaire, le royaume est en paix et prospère notamment grâce au commerce triangulaire et à l’essor du textile.
Fleury bénéficie de la faveur royale qui en fait un des principaux ministres d’Etat du début du règne de Louis XV. Autour de lui, l’équipe ministérielle est docile et efficace, et l’utilité publique est à l’ordre du jour. Dans ce contexte, P. Orry(1689-1747) améliore la circulation des subsistances en mettant en place une politique routière grâce à la corvée royale (taxe perçue sous forme de travail. Manouvriers : force de travail, fermiers : attelages).
En matière fiscale, les réformes sont moindres. Orry tente d’établir une taille tarifée et de rétablir le Dixième mais doit se heurter à de fortes résistances. La faiblessestructurelle de la fiscalité d’Ancien Régime est provisoirement masquée par la prospérité.
Pendant cette période de paix, le chancelier d’Aguesseau (1668-1751) entreprend la lourde tâche d’unifier un droit qui doit tenir compte des droits coutumiers et des privilèges traditionnels. Il avance avec prudence mais se montre néanmoins virulent envers la publication et veut à tout prixréduire le flot de permissions tacites caractéristique de la période 1729-1737.
Aux premiers temps du siècle, la lutte n’est pas permanente entre le pouvoir et les philosophes tant le jansénisme est au cœur des préoccupations.
2) Le jansénisme entre les convulsions et l’appel comme d’abus
Si d’Aguesseau a été imprégné par la sensibilité janséniste, lepouvoir, au cours des années 30 tente de se dégager de la doctrine. Sur la tombe d’un diacre (Pâris), mort en 1727 et enterré au cimetière Saint Médard, se produisent des miracles, des guérisons suivies de convulsions qui ne manqueront pas d’attirer les foules. En réaction à cet affront janséniste, le cimetière est fermé sur ordonnance royale en janvier 1732.
Mais guérisons etconvulsions se poursuivent dans des maisons de particuliers où certains sont soumis à des tortures infinies pour prouver que leur corps a été miraculeusement préservé de la souffrance par une intervention divine. Le mouvement convulsionnaire est dénoncé par les philosophes et particulièrement persécuté par le pouvoir, mais s’attire, à Paris au moins, une certaine sympathie de la population.Le Parlement, par la procédure de l’appel comme d’abus, continue de défendre les ecclésiastiques victimes de leur opposition à la bulle mais le roi refuse la déclaration de 1731 qui le réaffirme. En 1732, le roi fait encore plus fort, il restreint le rôle du Parlement et tente de limiter l’appel comme d’abus mais les magistrats répondent par la grève, suivie de l’exil. En 1732,…