Fiche de lecture 1984 (george orwell)
Fiche de lecture
1984 (George Orwell)
Une peinture effrayante du totalitarisme.
mercredi 21 mars 2007, par Clair de Plume
Les écrits complets de George Orwell (essais, articles, lettres) occupent quatre volumes parus aux éditions Ivrea/éditions de l’Encyclopédie des nuisances. On ne connaît en général de cette œuvre monumentale que La ferme des animaux et 1984, dans doute parce que, dans ceslivres, Orwell « parvint à saisir avec une acuité stupéfiante la nature exacte, et alors historiquement inédite, de l’oppression totalitaire » (Jean-Claude Michéa, Orwell éducateur, éd. Climats).
1984 est paru un an avant la mort d’Orwell. On ne peut parler de ce roman sans évoquer le cheminement qui a amené Orwell à l’écrire.
Les six années qu’il passe dans un internat, de huit à treizeans, marquent le jeune Eric Blair (son vrai nom) pour le restant de ses jours. Il demeurera profondément anarchiste, et éternellement méfiant envers toute autorité.
En 1922, il s’engage dans la police coloniale britannique en Birmanie. Sur cette expérience, il écrit deux livres : Comment j’ai tué un éléphant, et Une histoire birmane, dans lesquels il fustige le système colonial britannique : « Mais,mon cher docteur, comment pouvez-vous imaginer que nous sommes dans ce pays dans un tout autre but que celui de le piller ? C’est pourtant simple. Le fonctionnaire maintient le Birman à terre pendant que l’homme d’affaires lui fait les poches » (Une histoire birmane).
Transmis à ceux qui ont fait voter une loi reconnaissant les effets bénéfiques de la colonisation.
En 1936, il s’engage sur lefront espagnol auprès des miliciens du POUM (Parti Ouvrier d’Unification Marxiste) pour défendre la République. Les communistes ayant trahi leurs alliés, Orwell, grièvement blessé à la gorge par une balle franquiste, est traqué dans sa fuite par les tueurs staliniens chargés de réduire au silence les combattants revenus du front.
Confronté de la manière la plus brutale qui soit à la naturetotalitaire du communisme, il devient socialiste, et le restera jusqu’à sa mort en 1950, à quarante-sept ans.
Désormais, il combattra publiquement l’URSS. A ce sujet, une polémique entretenue depuis plusieurs années ne cesse de resurgir. Orwell aurait transmis à une fonctionnaire du gouvernement britannique une liste noire d’intellectuels communistes. La vérité a été rétablie par un livre (George Orwelldevant ses calomniateurs, Ivrea/L’encyclopédie des nuisances, 1997).
Orwell, malade, reçoit la visite de Celia Kirwan, belle-soeur de son ami Arthur Koestler. Elle participe, en tant que fonctionnaire du Foreign office, à la campagne antistalinienne menée par le gouvernement. Elle recherche des personnes susceptibles de l’appuyer. Orwell lui donne alors une liste de trente-huit personnalitésqu’il est inutile de contacter car ce sont des sympathisants communistes plus ou moins avoués, et donc peu susceptibles de l’aider. La Grande Bretagne n’a pas organisé de chasse aux sorcières : le seul désagrément que connurent ces trente-huit personnes fut de n’avoir pas été invités à participer à la campagne antistalinienne.
La fille de Celia Kirwan retrouva un double de la liste, qu’elle confiaà l’historien Garton Ash. Celui-ci publia le « scoop » à la une du Guardian en 1996, sous-entendant qu’Orwell aurait été une « marionnette du gouvernement ». L’information parut suffisamment croustillante pour que certains médias la relaient régulièrement, malgré explications et démentis.
Si Orwell s’était engagé dans la lutte contre le stalinisme, c’est parce qu’il était absolument convaincuque le totalitarisme peut « triompher n’importe où ». Il avait l’intime conviction qu’il faut endiguer à tout prix la montée des fascismes et du totalitarisme généralisé. « Ce qui me pousse au travail, disait-il, c’est toujours le sentiment d’une injustice, et l’idée qu’il faut prendre parti. (…) Je constate que c’est toujours là où je n’avais pas de visée politique que j’ai écrit des livres…