La fin du papier ?

Introduction

Dans son ouvrage « Tas de pierres » Victor Hugo disait de la presse qu’elle avait succédé au catéchisme dans le gouvernement du monde, « Après le pape, le papier ». A son époque et encore longtemps après, ledit support était synonyme de liberté, un monde sans lui était impensable pour les penseurs d’alors. Aujourd’hui, force est de constater que ce n’est plus le cas. Presse etédition sont en ébullition, une révolution est en marche.

Afin de répondre à la question soulevée de la manière la plus efficace possible, il est apparu judicieux de rencontrer un professionnel. Arnaud Viviant est un journaliste mais également un écrivain français. Il a notamment collaboré aux journaux Libération et Les Inrockuptibles. Il fut aussi chroniqueur dans l’émission Arrêt sur images surFrance 5 et est régulièrement invité en tant que critique au Masque et la Plume . Un premier constat est né de cette rencontre : la problématique n’est pas réellement la fin du papier en soit mais plutôt celle des professions qui exercent principalement autour et grâce à ce support. De cette conclusion, il paraissait nécessaire d’orienter l’entretien sur deux axes : les métiers de l’édition et lejournalisme.

Concernant la presse, pour Arnaud Viviant, le problème se situe avant même l’apparition d’internet, la presse rencontrant déjà d’importantes difficultés financières. D’équipes rédactionnelles dotées d’une grande liberté, nous sommes passés à des structures appartenant à de grands groupes (Bolloré, Lagardère, Rothschild etc.). D’où d’abord un problème de liberté d’expression.Ensuite, la fin du papier, c’est aussi la fin de l’information hiérarchisée telle qu’on la connaissait. Ainsi, la taille du papier, l’espace occupé par l’article dans le journal, l’épaisseur des feuillets étaient autant de signes indiquant l’importance donnée par la rédaction à telle ou telle information. L’espace était une idéologie en soit, ce qui pouvait faire l’objet de la Une du Figaro nepouvait n’être qu’une brève dans Libération ou inversement : « Parce qu’il n’est plus confronté à ce problème d’espace, Internet ne propose donc plus une vision du monde : il est plutôt de l’ordre d’une tautologie. Internet est un espace horizontal, quand le journal était un espace vertical où être en Une n’est pas la même chose qu’être en page 23. D’où un problème de lecture : comment comprendre lemonde quand celui-ci est mis à plat? ». Par conséquent, les journaux avec l’arrivée d’Internet se sont remis à hiérarchiser, mais de manière anarchique. Ce que le journaliste ne peut pas coucher sur le papier faute d’espace, il lui est conseillé de le publier sur son blog. Ainsi, pour un sujet donné, il apparaît parfois que son traitement par la blogosphère est plus pertinent, plus intéressant que letravail effectué sur ce même sujet par le journal. Selon Arnaud Viviant, la bonne combinaison n’a pas encore été trouvée, les journaux ne parvenant pas à aboutir à une complémentarité idéale avec internet tandis qu’internet n’a pas davantage réussi à réaliser un véritable journal virtuel capable de concurrencer l’offre papier présente.

Son constat quant au monde du livre est tout aussi amèremême si la problématique et les conséquences diffèrent. Ce qu’il appelle la « liseuse électronique » (l’e-book) va transformer radicalement le mode économique de l’édition. Deux types d’ouvrages risquent d’être rapidement touchés par cette nouvelle technologie. Le livre de poche d’abord, puis les manuels de tous ordres. En effet, A. Viviant soulève la question d’une probable inutilité future dulivre-papier : « A quoi bon acheter des livres de poche mal imprimés sur du mauvais papier avec des typographies minuscules, quand on peut acheter un livre électronique dont on peut grossir (et changer) d’un clic la typographie? ». Quant aux manuels sur papier, pourquoi continuer à en acquérir si la recherche par mots-clés, la fonction « copier/coller » sont tout autant d’outils qui facilitent…