La turquiedans l’union européenne
La Turquie dans l’union européenne
La question divise les politiques et les citoyens de l’Europe. A quelques jours d’un scrutin qui a relancé le débat, à quelques mois de la décision des Vingt-Cinq sur l’ouverture de négociations avec Ankara, L’Express propose des clefs pour comprendre. Sereinement
La Turquie a-t-elle vocation à entrer dans l’Union européenne? Brutalement, l’échéanceapprochant, cette nouvelle question d’Orient fait irruption dans le débat électoral. C’est en décembre, en effet, que les Vingt-Cinq devront décider s’ils sont prêts à ouvrir un calendrier de négociations pour l’adhésion du candidat turc. Une perspective à l’horizon 2015-2020, hissée au rang de grande cause nationale en Turquie, où l’actuel gouvernement, venu de l’islam politique mais qui s’affirmeconverti à la laïcité, ne ménage pas ses efforts pour réformer à marche forcée un modèle républicain hérité d’Atatürk, plus proche de la démocratie autoritaire que de la démocratie libérale. Les citoyens de l’Union européenne, eux, sont divisés. Hostiles en Autriche et en France, réservés aux Pays-Bas et en Allemagne. Souvent, ils ignorent que leurs dirigeants ont déjà admis cette «vocation à rejoindrel’Union», il y a cinq ans, à Helsinki. Les droites française et allemande sont, en principe, contre, mais pas les droites espagnole et italienne. La gauche est plus favorable, sous réserve d’inventaire des progrès démocratiques, mais certaines personnalités, comme l’ancien ministre des Affaires étrangères (PS) Hubert Védrine, y sont opposées. Tony Blair, Gerhard Schröder, Jacques Chirac, SilvioBerlusconi soutiennent cette candidature.
Pays charnière, entre Méditerranée et Asie centrale, terre composite, avec des écarts de revenus de cinq à un entre la région d’Istanbul et le Sud-Est anatolien, et une condition féminine inégale – «La Turquie, c’est à la fois le Danemark et le Pakistan», avait dit un jour l’ancien président Demirel – la Turquie suscite les passions et attise les peurs.Parce que le débat actuel, tel qu’il est engagé, n’échappe pas à la mauvaise foi et renvoie à la source même du projet européen, il convient d’examiner sereinement une candidature qui peut être un risque comme une chance pour l’Union. Donner des clefs à ses lecteurs pour mieux aborder ce dossier complexe, telle est l’ambition de L’Express en présentant et analysant les éléments de la controverse.Pour
Il existe une Turquie d’Europe: la Thrace et Istanbul, ancienne Constantinople.
Contre
L’Asie commence sur la rive orientale du Bosphore.
La Turquie peut-elle invoquer la géographie pour revendiquer son appartenance à l’Europe?
Non, pour les opposants à la candidature d’Ankara. «Le Bosphore ne coule pas au milieu de l’Anatolie», a tonné VGE. A leurs yeux, la Turquie d’Europe – la Thraceet la rive nord d’Istanbul, 3% du territoire total (779 000 km²) mais 20% de la population (Istanbul compris), ne compte pas. En outre, une Turquie dans l’Union repousserait notre frontière extérieure jusqu’à celle de la Syrie, de l’Irak, de l’Iran, de l’Arménie et de la Géorgie…
Elle poserait la question des républiques du Caucase, déjà membres du Conseil de l’Europe. «C’est comme si laFrance demandait d’adhérer à l’Union africaine!» raille l’ancien ministre Hubert Védrine. Et pourquoi pas aussi le Maghreb ou le Liban, où le génie grec fait naître Europe? D’ici à un demi-siècle, «la vocation de l’Union est de regrouper tous les territoires qui entourent les rives de la Méditerranée», plaide déjà Dominique Strauss-Kahn (PS) dans un récent rapport remis à Romano Prodi. En feignantd’oublier que le traité de Maastricht sur l’Union européenne précise, comme auparavant le traité de Rome, que «tout Etat européen peut demander à devenir membre de l’Union» (art. O). Ce qui qualifie, en droit, la Turquie, même si les partisans de son adhésion préfèrent rappeler que c’est le contrat sur les valeurs politiques communes qui fonde la construction européenne.
Pour
Il a été un acteur du…