Les femmes musulmanes voilées d’origine marocaine sur le marché de l’emploi.

Les femmes musulmanes voilées d’origine marocaine sur le marché de l’emploi.

Cet article tente de mettre en évidence les difficultés que rencontrent les jeunes Marocaines portant le voile islamique sur le marché du travail. Il présente les résultats d’une étude, qui est une partie d’une recherche plus large abordant les questions liées à la reconnaissance de l’égalité des droits en faveur despopulations issues de l’immigration1, basée sur une approche empirique et qualitative. La discrimination sur le marché du travail subie par les femmes musulmanes coiffées du foulard, les difficultés qu’elles rencontrent pour s’insérer dans le monde professionnel nous amènent à constater l’échec de la croyance, dominante dans les années 80, selon laquelle la scolarisation de la femme immigréecontribuerait à l’émancipation (sous-entendue occidentalisation) de celle-ci. Cette thèse postule, en outre, que la population féminine d’origine étrangère éduquée (émancipée), ayant les moyens de s’insérer dans la vie sociale et économique, contribuera à l’intégration réussie des futures générations issues de l’immigration. Aujourd’hui, force est de constater les faiblesses d’une telle positionpuisque la réussite scolaire ne se traduit pas nécessairement par l’insertion professionnelle, au contraire, l’exemple des femmes voilées nous montre que la formation n’empêche pas leur exclusion de la société belge.

La discrimination ethnique et raciale à l’embauche Le thème de la discrimination raciale à l’embauche et sur le lieu du travail a fait l’objet, ces dernières années, d’une attentiongrandissante dans les pays occidentaux. Plusieurs études sérieuses se sont penchées sur cette problématique affectant en particulier les minorités ethniques, non européennes, installées en Europe depuis les années 60. Elles constatent que la population marocaine d’origine musulmane est une catégorie sociale très vulnérable dans le contexte professionnel, une situation qui s’expliqueindéniablement par les traitements discriminatoires, liés à l’origine nationale, pratiqués par les employeurs belges. La question qui nous intéresse plus particulièrement est celle relative au traitement différencié que subie la composante féminine de la population musulmane couverte d’un voile. Mais avant d’entrer dans ce débat, il est nécessaire de faire le point sur la situation générale de ladiscrimination à l’embauche en Belgique et en Europe. Le Bureau International du Travail (BIT) a mené un projet de recherche de 7 années sur le thème de la “Lutte contre la discrimination à l’égard des travailleurs immigrés et des minorités ethniques dans le monde du travail”, dans certains pays occidentaux, dont la Belgique. Cette recherche2 a mis en évidence des niveaux significatifs et inquiétants dediscrimination à l’embauche dans tous les pays analysés. Les enquêtes, basées sur la méthode de test de situation, ont révélé des taux de discrimination raciale globaux très élevés. Les résultats dévoilent qu’au moins un candidat d’origine immigrée sur trois se heurte à une discrimination. Le BIT note que la discrimination est particulièrement forte dans les secteurs liés aux services, notamment dansles branches où le contact avec la clientèle est une composante essentielle du service fourni. L’organisme international du travail qualifie cette
1 Projet MOST : Multiculturalisme et modes de citoyenneté en Belgique, projet financé par la Région bruxelloise, 2000. 2 Les conclusions de la recherche ont été publiées sur le site Internet du BIT à l’adresse suivante : “ http://www.ilo.org ”.

1 tendance “ d’extrêmement inquiétante ” dans la mesure où les services sont précisément le secteur où la croissance de l’emploi est la plus forte. L’enquête en Belgique3 a porté sur la discrimination raciale en raison de l’origine marocaine dans les trois régions du pays. Les résultats montrent que les candidats marocains rencontrent plus de difficultés que les candidats d’origine belge, la…