Moliere dom juan
Fiche Cours
Nº : 91028
FRANÇAIS
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LE TALENT C’EST D’AVOIR ENVIE
Etude d’œuvre : Dom Juan de Molière
Plan de la fiche
1. Une pièce hybride 2. Une pièce politique : pourquoi Louis XIV n’a pas condamné Molière 3. Une pièce à scandale
Une pièce hybride
Dom Juan a choqué. Par l’audace de ses thèmes, mais également par l’hybridité de sa forme. Atypique dans la créationdramatique de l’époque, elle l’est également dans l’œuvre de Molière. Dom Juan ou le festin de pierre réécrit un mythe largement mis au goût du jour par la littérature de l’époque dans une facture en rupture avec les conventions. La pièce mêle les registres, ne respecte pas la règle des unités, met en péril vraisemblance et bienséance. L’histoire « vécue » d’un certain Dom Juan Tenorio, seigneurespagnol du XVIe siècle, entre en littérature grâce à la comédie espagnole du moine Tirso de Molina dans les années 1620-1630. Les spécialistes discutent pour savoir si Molière connaissait ou non l’original. Peu importe. L’histoire s’était diffusée et il ne fait pas de doute que Molière fréquentait les tragi-comédies de ses contemporains Dorimond et Villiers, toutes deux intitulées Le Festin depierre, ainsi que les versions farcesques qu’en donnaient les Italiens. Molière complexifie le schéma de la pièce et mêle tragique, tragi-comique, farce, merveilleux et burlesque. Le tragique est principalement incarné par les personnages d’Elvire et de Dom Louis, mais également par Dom Juan dans sa confrontation prométhéenne à l’au-delà. Tragique en effet est la situation d’Elvire, qui aime encoreun Dom Juan, qui l’a séduite, enlevée et épousée, et n’en est plus aimée. Elle sait, malgré le désir qu’elle a de continuer à espérer, qu’elle n’a rien à attendre de lui. L’émotion et la passion affleurent dans son discours qui prend un tour déjà racinien. Le ton de Dom Louis n’est pas très différent, qui déplore d’avoir honte de ce qui a fait l’objet de tant de vœux, de prières et de chagrins.Mais Dom Juan, qui à bien des moments joue les metteurs en scène de ses interlocuteurs, ne laisse pas le tragique envahir la scène. D’un mot ironique ou cynique, il casse le ronflement d’une prose trop belle, d’une tirade trop longue et larmoyante. Ainsi dans la scène VI de l’acte IV, quand Elvire revient le voir, chargée d’un amour épuré, détaché, qui n’a plus d’autre objet que le salut de l’hommequ’elle a chéri, Dom Juan l’interrompt en s’adressant à Sganarelle d’un « tu pleures, je pense ». Il est aussi un autre tragique : celui du destin de Dom Juan, engagé dans une lutte avec Dieu, qui attire sur lui menaces et malédictions. Mais l’affrontement ne se fait pas tant dans les discours que dans une série d’actions provocatrices. Dom Juan joue cyniquement avec les paroles des autres, qui nesont pour lui que pause et incapacité à défier la transcendance. Ainsi la rhétorique tragique est sans cesse mise à distance et relayée par d’autres registres. La pièce puise dans une tradition tragi-comique : la scène se passe en Espagne. Les personnages défendent leur honneur et ont l’épée à fleur de peau. Dom Juan est poursuivi par douze hommes armés, il rencontre Dom Carlos aux prises avec desvoleurs et court à son secours. La vengeance et la mort rodent.Tout se passe comme si la menace d’un châtiment divin se doublait sans cesse de la menace d’une mort humaine pour conférer à la pièce une unité d’action et un dynamisme dramatique. Tragique et tragi-comique sont également agrémentés d’une parodie de pastorale à l’acte II, qui se déroule dans un environnement champêtre, où les paysansparlent patois en lieu et place du langage alambiqué des bergers et où le cynisme de Dom Juan et l’attitude intéressée de Charlotte font office de comportements nobles sincères. La farce n’est pas non plus absente, dont Sganarelle est le parangon. Valet, il est également le bouffon d’un Dom Juan, qui à bien des moments, l’autorise, pour son plus grand plaisir, à se laisser emporter dans des…