Sociolinguistique

La variation sociale en français
Gadet Françoise, 2007, 2e édition, Paris, Ophrys.
Cyril Trimaille
Texte intégral
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Comme la précédente, cette deuxième édition revue et augmentée se propose de décrire le français contemporain, de s’interroger sur sa spécificité et de mettre ces éléments en perspective avec les débats et enjeux qui traversent non seulement lasociolinguistique mais aussi la linguistique générale actuelle. Ce faisant, F. Gadet réaffirme la pertinence du rapprochement entre linguistique et sociolinguistique. Le parti pris de l’auteure est, comme dans nombre de ses écrits, de décrire différentes dimensions des variations du français, en partant des pratiques langagières authentiques de sujets (et non seulement de locuteurs), saisies en contexte.
2Pourdévelopper cette perspective « écologique » sur le français et ses usages, la structure du livre reste identique à celle de la précédente édition. Six chapitres, tous prolongés de bibliographies thématiques, de pistes d’approfondissements variées (pour aller plus loin) et d’orientations bibliographiques. La plupart des sections descriptives et analytiques sont ponctuées d’études de cas etenrichies de développements intitulés outils d’analyses, consacrés à des aspects théoriques ou méthodologiques. Les six chapitres sont en outre complétés par des suggestions d’exercices, un glossaire d’une centaine de notions, une bibliographie générale et un index, qui sont autant d’outils d’approfondissement fort utiles.
3Le premier chapitre est une entrée en matière qui pose, pour toute langue, lecaractère fondamentalement constitutif de l’hétérogénéité. F.?Gadet y définit, exemples à l’appui, les principes extra-linguistiques qui concourent à configurer ou structurer cette diversité : les dimensions diachroniques, géographiques, sociales et situationnelles (parmi lesquelles le diamésique). L’auteure y évoque le rôle précurseur de la dialectologie dans l’étude de la diversité linguistique etles nouvelles potentialités offertes par le développement des grands corpus, tout en appelant à une grande rigueur dans toutes les procédures, de leur constitution à leur exploitation. Elle part ensuite de la réception (perception et évaluation) des phénomènes variationnels, souvent en termes de variétés qui, bien que rarement nommées, ont tendance à essentialiser des usages toujours labiles,pour aboutir à une discussion des « catégorisations d’experts ». Plaidant, à la suite de Coseriu, pour une approche variationnelle de la langue, elle pointe les carences à la fois des linguistiques de l’homogène et de l’appréhension de l’hétérogénéité en variétés, qui déplacent à un autre niveau la recherche de l’homogénéité perdue.
* 1 ?Alain Rey, 1972, « Usages, jugements et prescriptionslinguistiques, Langue française 16, 428.(…)
4F. Gadet définit ensuite deux types de normes, objective (statistique) et subjective (La Norme, imposée). Si l’on ne peut qu’être d’accord avec la nécessité de distinguer entre ces deux types de normes, on peut néanmoins discuter le choix de l’adjectif subjectif pour référer à ce que d’autres (notamment Rey 19721) nomment norme prescriptive, réservant lequalificatif subjectif à la conscience normative des locuteurs. En lien avec ces questions de norme et de standardisation, F. Gadet conclut le chapitre en appréhendant le poids de l’idéologie du standard qui a conduit à ce purisme si typiquement français.
5Le deuxième chapitre est consacré aux relations entre oral et écrit. L’auteure s’y intéresse à l’observation et à la transcription de l’oraldont les structures, adaptées aux contraintes mais aussi aux potentialités matérielles et situationnelles (co-présence, multimodalité liée à la « vive voix », co-énonciation), apparaissent encore souvent, à tort, lacunaires ou défectueuses. Cela soulève nombre de questions cruciales à propos de la représentation de l’oral par les linguistes. F. Gadet montre encore que ces questions, d’apparence…