Crise de la dette : tour du monde des prochaines cibles
Crise de la dette : tour du monde des prochaines cibles
la crise née en Grèce, qui frappe la zone euro depuis déjà trois mois, prend une nouvelle dimension. Ni le « mégaplan » de soutien public de 750 milliards d’euros décidé dans l’urgence, ni les mesures d’austérité promises par les Etats, ne parviennent à rassurer les marchés. La monnaie unique s’enfonce chaque jour un peu plus. Elle abaissé, mercredi 19 mai, à moins de 1,22 dollar, du jamais vu depuis avril 2006.
Jusqu’où ira sa chute ? Cette crise s’arrêtera-t-elle aux frontières de l’Europe ? Pour les économistes, le danger est que cette crise de l’euro se mue en une crise mondiale des dettes publiques. L’Américain Nouriel Roubini, l’un des rares à avoir vu venir le choc des subprimes, a prévenu, mardi, à Londres: « Ce qui sepasse en Grèce n’est que la pointe d’un iceberg de problèmes de dettes et de déficits publics, dans beaucoup de pays développés, pas seulement en zone euro mais aussi au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et au Japon. »
Toutefois, face aux doutes et à d’éventuelles attaques des marchés, prompts à désigner des cibles, tous les pays n’affichent pas la même vulnérabilité.
• LES PAYS À RISQUE ÉLEVÉ
Les marchésne pardonnent pas aux Etats qui cumulent un fort niveau d’endettement, ou de gros déficits, avec des problèmes de compétitivité. Des perspectives de croissance faibles, voire nulles, signifient moins de recettes fiscales, donc une moindre capacité à rembourser la dette.
Avec un énorme déficit public – 11 % du produit intérieur brut (PIB) – et un commerce extérieur déficitaire, l’Espagne, passéede la surchauffe à la récession, se trouve dans leur ligne de mire. La demande intérieure est pénalisée par l’endettement des ménages et des entreprises. L’activité est plombée par l’éclatement de la bulle immobilière. Son tissu industriel est faible. Aux yeux des investisseurs, le pays, privé de croissance, est un maillon faible.
Le Portugal souffre aussi d’une faible compétitivité. Le secteurpublic y est gonflé et la population vieillit. Les comptes sociaux ne peuvent que se dégrader. Pour les marchés, ce pays ressemble à s’y méprendre à la Grèce, en moins grave.
En Italie, le poids de la dette et la longue tradition de mauvaise gestion sont mal perçus. L’un des points faibles du pays est d’être entré dans la zone euro avec une monnaie surévaluée. A plus long terme, se posera leproblème de la compétitivité d’une économie spécialisée sur des secteurs mâtures et la démographie est faible.
Même s’il bénéficie d’une structure de dette favorable – avec des échéances de remboursement longues – et de marges de manœuvre fiscales, même s’il peut jouer sur la dévaluation de la livre et sur des taux d’intérêt bas pour soutenir son économie, le Royaume-Uni se range dans les pays àrisques, avec un déficit de 11,4 % du PIB. Le pays a fait preuve, par le passé, d’une meilleure faculté d’adaptation aux chocs que l’Europe continentale, mais les marchés vont tester sa capacité à se serrer la ceinture et tenir ses déficits. Toute la difficulté du gouvernement deDavid Cameron sera de mettre en place des politiques restrictives sans plonger le pays dans la récession.
• LES PAYS À RISQUEMOYEN
Paradoxalement, certains pays semblent relativement à l’abri d’une attaque des marchés malgré un endettement colossal. Du moins à court terme. Le Japon est un cas d’école. Sa dette publique est vertigineuse (227,1 % du PIB en 2010) mais détenue « à 93 % par des investisseurs domestiques », indique Emmanuel Hermand, de la banque Nomura. L’Archipel puise dans l’immense épargne des ménagesnippons. Ce fardeau risque pourtant de devenir lourd à porter pour une population qui vieillit et décline. A long terme, la solvabilité du pays est « en danger », avertit l’agence de notation Fitch.
En Irlande, l’endettement est loin d’atteindre ces sommets. Mais les chiffres se sont emballés sur fond de récession et d’explosion du chômage, après l’éclatement de la bulle immobilière: la dette…