Alain: critique du freudisme « le freudisme si fameux… »
Freud raconte qu’un président de séance, au lieu de prononcer la formule d’ouverture habituelle, se met à dire « je déclare la séance close ». Ce lapsus illustre selon lui les interventions ponctuelles de l’inconscient dans la vie de tous les jours. A partir de l’étude des actes manqués et des rêves, il établira l’hypothèse de l’inconscient, qui bouleversera la conception classique de l’homme. Cebouleversement ne fut pas sans soulever de nombreuses objections. Ainsi, Alain s’interroge sur les enjeux moraux de la conscience de soi.
Nous verrons dans ce commentaire les différentes remises en cause du freudisme faites par Alain. Nous commencerons par parler de la place que prend le freudisme aujourd’hui et par faire l’analyse de ce dernier à travers les propos d’Alain, nous verrons ensuitela critique du freudisme que fait Alain à travers les rêves et la sexualité selon Freud, puis nous terminerons par le rejet moral du freudisme.
Tout d’abord, Alain reconnaît avec ironie la place grandissante que la théorie freudienne a pu prendre dans la pensée commune. Le choix du mot « freudisme » a une connotation péjorative, et montre qu’Alain s’attaque plus à certaines dérives de lapsychanalyse qu’à l’hypothèse première de Freud. Ce choix est renforcée par « si fameux »: il est vrai que la pensée freudienne a acquit de la notoriété, mais Alain nous laisse entendre qu’elle ne repose sur rien de vraiment rigoureux, qu’elle n’est qu’un effet de mode. Alors que Freud voulait travailler scientifiquement, Alain réduit cet effort de rigueur pour n’en faire qu’un « art d’inventer », refusantainsi toute valeur scientifique à sa théorie. Alain met aussi l’accent sur un des reproches le plus souvent fait à Freud: l’hyper sémantisation de son interprétation. Il est courant dans certaines pratiques psychanalytiques de donner plus de sens qu’ils n’en méritent vraiment à des détails du comportement humain. Cette tendance est mise en relief dans le texte au travers des oppositions de termesutilisés : « homme/animal » et « redoutable/ordinaire ». La psychanalyse pour Alain semble vouloir faire de l’homme un monstre.
De plus, on retrouve aussi ce penchant de l’hyper sémantisation dans l’analyse des rêves. Freud a insisté sur l’importance des rêves, pour lui le rêve est un désir réalisé, et son travail sur l’interprétation des rêves a sans doute joué un rôle important dans l’attentionprêtée par le public pour la psychanalyse. Les rêves ont toujours intéressé les hommes. Depuis fort longtemps, des interprétations ont été données à leur sujet ; l’originalité de Freud est de donner un sens en rapport avec notre vie psychique: de nombreux rêves traduisent nos préoccupations. Il faut bien reconnaître qu’il est facile d’interpréter les rêves aux vues de leurs récits nombreux et variés.Mais selon Freud, cette facilité n’est qu’une illusion, et il faut aller chercher ailleurs, au niveau de notre pensée profonde et inconsciente. On sait que Freud a insisté sur le rôle des pulsions sexuelles qui s’expriment au travers de nos rêves, profitant d’une baisse d’activité du surmoi. Cependant pour Alain, les « chose du sexe » sont liées au corps et nous retrouvons ici l’influence deDescartes. Alors que Freud fait l’hypothèse d’un inconscient à l’intention du corps, Alain renvoie cette volonté vers le corps. La conception mécaniste de Descartes est ainsi mise en valeur, la sexualité est reliée à notre animalité. Pour Alain, ces « choses » n’ont pas de prise sur le moi qui reste l’unique sujet de nos pensées. L’erreur de la psychanalyse selon Alain est de fonder l’hypothèse del’inconscient sur des interprétations dont on peut à tous moments contester la valeur et la réalité.
Par la suite, Alain va changer de ton et accorder à Freud que « l’homme est obscure à lui même ». L’ironie est moins présente, ce qui est reproché au freudisme est cette tendance souvent excessive à vouloir rapporter toutes les conduites à l’expression d’un inconscient caché. C’est aux yeux d’Alain la…