C.cass chambre mixte 26 mai 2006

Commentaire d’arrêt : Ch.Mixte, 26 mai 2006.

L’arrêt de rejet, rendu le 26 mai 2006, par la Chambre Mixte de la Cour de cassation, s’intéresse à la sanction de la violation d’un pacte de préférence.

Un acte de donation-partage contenant un pacte de préférence, dressé le 18 décembre 1957, a attribué à Mme Adèle A un bien immobilier. Une parcelle dépendant de ce bien a été transmise en 1985,par un acte de donation-partage rappelant le pacte de préférence, à M. Ruini A, qui l’a ensuite vendue à la SCI Emeraude, par acte notarié, le 3 décembre 1985.

Invoquant une violation du pacte de préférence stipulé dans l’acte du 18 décembre 1957, dont elle tenait ses droits en tant qu’attributaire, Mme X a demandé, en 1992, sa substitution dans les droits de l’acquéreur et, subsidiairement, lepaiement de dommages et intérêts.
La Cour d’appel de Papeete, dans son arrêt du 13 février 2003, a débouté Mme X de sa demande qui tendait à obtenir une substitution dans les droits de la société Emeraude.
Les consorts X forment donc un pourvoi en cassation.

La demanderesse invoque d’une part que la Cour d’appel a violé et fait une fausse application de l’article 1142 du code civil au motifque l’obligation de faire ne se résolvait en dommages et intérêts que lorsque l’exécution en nature était impossible du fait de l’impossibilité de contraindre le débiteur de l’obligation à l’exécuter matériellement et qu’en dehors d’une telle impossibilité, la réparation devait s’entendre comme une réparation en nature. Or, le juge avait le pouvoir de prendre une décision valant vente entre lesparties.
D’autre part, la demanderesse soutient que la Cour d’appel a violé les articles 1134, 1138 et 1147 du code civil. Elle précise, en effet, qu’un pacte de préférence s’analyse en l’octroi d’un droit de préemption, et donc en une obligation de donner, dont la violation doit entraîner l’inefficacité de la vente conclue malgré ces termes avec le tiers, et en la substitution du bénéficiaire dupacte de préférence à l’acquéreur, dans les termes de la vente.

Dans cet arrêt, il s’agit de savoir, si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers, en méconnaissance de ses droits, et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur.

La Chambre Mixte de la Cour de cassation, dans son arrêt du 26 mai 2006, rejette le pourvoi enconsidérant que « Si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur, c’est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir. Ayant retenu qu’il n’était pasdémontré que la société Emeraude savait que Mme X avait l’intention de se prévaloir de son droit de préférence, la Cour d’appel a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte ».
La Cour de cassation, avec cet arrêt, procède à un revirement de jurisprudence.
Auparavant, en cas de violation d’un pacte de préférence (actepar lequel un promettant s’engage envers un bénéficiaire à lui proposer en priorité la conclusion d’un contrat s’il décide de conclure) seuls des dommages et intérêts pouvaient être accordés au bénéficiaire du pacte lésé. Cet arrêt admet que le bénéficiaire d’un pacte de préférence puisse exiger l’annulation du contrat conclu avec un tiers et qu’il puisse obtenir sa substitution au tiers acquéreur.Pour cela, il faut que le tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir.

La Cour de cassation admet, en cas de violation d’un pacte de préférence, l’annulation de la vente entre un propriétaire et un tiers et la substitution du bénéficiaire à l’acquéreur (I), bien que cela soit soumis à certaines…