Commentaire de l’arrêt perruche

Commentaire d’arrêt : Assemblée plénière de la Cour de Cassation du 17 novembre 2000

L’arrêt que nous avons à commenter est celui de l’assemblée plénière de la Cour de Cassation en date du 17 novembre 2000. Cet arrêt a trait aux conditions communes de responsabilité, qui sont le préjudice et le lien de causalité. Nous nous attacherons au caractère légitime du préjudice. Cet arrêt estla continuité de l’arrêt Perruche datant du 13 janvier 1992.
Il s’agit ici d’un enfant atteint de rubéole congénitale, rubéole qui n’avait pas été détectée par les analyses du laboratoire lors d’un diagnostic prénatal. En 1982, M.Y, médecin traitant de la famille Perruche diagnostique les symptômes de la rubéole chez Mme X. Cette dernière, enceinte, déclare que si le diagnostic de la rubéoleest confirmé, elle souhaite pratiquer une IVG. En raison de deux résultats contradictoires, le laboratoire de biologie médicale procède à une analyse de contrôle du premier échantillon. En 1983, Mme X met au monde son enfant, qui est atteint du syndrome de Gregg, conséquence directe de la rubéole congénitale.
Les époux assignent le médecin et le laboratoire en réparation de leur préjudicepersonnel ainsi que celui de l’enfant. Le TGI, dans un jugement du 13 janvier 1992, retient une faute de M.Y et du laboratoire car le premier prélèvement était positif. Le laboratoire ne contestant pas la faute, M.Y a interjeté appel. La CA de Paris, dans un arrêt rendu le 17 décembre 1993, a retenu que M.Y a commis une faute dans l’exécution de son obligation contractuelle de moyens puisque si lesrésultats étaient positifs, elle aurait procédé à une interruption volontaire de grossesse. Il n’y a pas de lien de causalité entre les fautes et le dommage. Elle donne indemnisation aux époux X. Cet arrêt a été cassé.
La Cour de renvoi, dans un arrêt rendu le 5 février 1999, ne considère pas que l’enfant puisse invoquer un préjudice réparable puisque son syndrome résulte de la rubéolecongénitale et non de la faute, et qu’il ne puisse se prévaloir de la décision de ses parents concernant l’IVG.
Les époux X forment un pourvoi en cassation.
Un enfant atteint d’un syndrome physique grave résultant d’une maladie non détectée lorsqu’il était en l’état de fœtus peut-il demander réparation du préjudice qu’il a subi, causé par des fautes de spécialistes ?
L’assemblée plénière dela Cour de Cassation, dans un arrêt rendu le 17 novembre 2000, casse et annule l’arrêt de la cour de renvoi. Elle énonce, en se basant sur les articles 1165 et 1382 du code civil, que le choix de Mme.X concernant la décision de procéder à une IVG si l’enfant avait été atteint d’un handicap certain , avait été empêché par les fautes commises par M.Y et le laboratoire. L’enfant peut donc demander laréparation du préjudice qui résulte de son handicap dont il est atteint causé par les fautes de M.Y et du laboratoire.
Pour tenter de répondre à la question posée par cet arrêt, nous allons procéder en deux parties. Dans une première partie, nous montrerons que la solution de la Cour de Cassation, qui a accepté une indemnisation en réparation du préjudice de l’enfant né handicapé, reste trèscritiquée. Dans une seconde partie, nous verrons que la loi anti-Perruche apporte de nouvelles conditions à cette réparation du préjudice de l’enfant né handicapé.

I Un lien de causalité large entre la faute et le préjudice subi : une indemnisation du préjudice de l’enfant critiquable.

La Cour de Cassation a accepté une indemnisation du préjudice de l’enfant né handicapé. Cette solutionreste cependant critiquable et vivement critiquée.

A/ Une indemnisation du préjudice de l’enfant causée par des fautes de praticiens.

L’assemblée plénière, dans notre arrêt, a admis la réparation du préjudice personnel des époux X, mais aussi celle de l’enfant né atteint du syndrome de Gregg suite à une rubéole congénitale. En l’espèce, la rubéole congénitale n’ayant pas été…