Commentaire du lac de lamartine

En réaction contre le rationalisme du XVIIIe siècle, le début du XIXe voit naître le mouvement romantique, regroupement d’écrivains qui affirment la toute puissance des sentiments individuels et créent des formes littéraires nouvelles où un moi douloureux et divisé tend à prendre une place centrale. C’est dans ce contexte que Les méditations poétiques de Lamartine publiées en 1820 apparurentcomme le coup d’envoi du mouvement, notamment, grâce au poème « Le Lac », considéré, aujourd’hui encore, comme le fleuron de la poésie romantique. Ce poème fut inspiré à Lamartine par la liaison amoureuse qu’il eut en 1816-1817 avec Julie Charles, une femme mariée atteinte d’un mal incurable qui l’emporta en 1817. Il est composé de seize quatrains hétérométriques, dans lesquels le poète se remémore unmoment passé avec sa bien-aimée au bord d’un lac et se plaint de la puissance du temps corrupteur qui emporte les êtres aimés, tout en suppliant la nature d’être le conservatoire éternel de la passion brisée. Nous verrons donc que ce poème lyrique tente d’être une lutte avec le temps qui passe, en fixant pour l’éternité dans la chair même des mots, un moment de bonheur inoubliable.

Ce poème secaractérise donc par son registre lyrique propre à l’esthétique romantique dont il se revendique : le poète se centre sur ses sentiments personnels en utilisant la fonction expressive du langage. Tout d’abord ce poème est construit sur une situation de communication particulière. En effet, le poète parle à la première personne et s’adresse au lac envisagé comme une figure personnifiée. Lasituation de communication est clairement définie par l’usage de la deuxième personne dans tout le poème. L’apostrophe « Ô Lac ! », caractérisée par l’usage de la majuscule donne au lac une dimension personnelle, renforcée par le nom « flanc » et par le verbe « mugir » des vers 10 et 9. Le temps subit le même traitement puisqu’il devient un interlocuteur aux vers 21 où l’on retrouve l’usage del’apostrophe « Ô Temps ! » et au vers 37 où l’adjectif « jaloux » renforce la personnification. La nature est également interpelée par le poète à la fin du poète. Elle est très présente dans l’ensemble du poème. Nous la retrouvons sous la forme de l’élément liquide avec l’image du lac mais également à travers l’évocation du « vent » vers 11 ou du « Zéphyr » vers 57 qui représente l’air ou des « rochesprofondes » qui représente la terre. Les « rochers », « grottes », « rocs » permettent quant à elle une image minérale de la nature, là où les « sapins », « coteaux », forêts » et le « roseau » dressent une image végétale. Cette communication imagée du poète avec les éléments de la nature n’est en fait qu’une manière d’utiliser la fonction expressive du langage, puisque le poète n’a en réalité pour butque d’exprimer ses sentiments.
En effet, le lexique de l’affectivité traverse ce poème comme l’indique l‘usage de l’interjection « Ô » des vers 5 et 21. On identifie également la présence de nombreux sentiments. Le champ lexical du bonheur permet d’évoquer le bonheur passé à travers les termes « chéris », « chère », « aimons », « jouissons », « ivresse », « extases sublimes », « heureux », et «bonheur ». Il s’oppose au champ lexical de la souffrance morale qui évoque la douleur de voir s’évanouir le bonheur et de perdre pour toujours ceux que l’on aime. On relève les mots « soupirs, « gémit », « malheureux », « malheur » . Les sentiments s’expriment aussi grâce aux modalités de phrase, notamment par les exclamations présentent aux vers 5, 41, 42 , 49 et qui parcourent des strophesentières comme les strophes 6, 9 et 16. Les interrogations sont aussi un moyen d’exprimer des sentiments : en effet, puisque le poète n’attend pas de réponse réelle des éléments naturels auxquels il s’adresse, ces interrogations prennent un caractère oratoire comme on peut le voir dans les strophes 1, 10 et 12 ainsi qu’aux vers 13 et 41. Les figures de répétitions traduisent également ces sentiments…