La juste valeur

DÉBAT SUR LA JUSTE VALEUR
Quelles réponses des institutionnels ?

• La juste valeur n’a pas été, en soi, un phénomène aggravant de la crise. Le débat autour d’elle se pose dès lors que le marché n’est plus efficient ou liquide (Michel Prada, AMF).La juste valeur a alors un effet multiplicateur de volatilité du marché (Jean-François Lepetit, CNC), aggravant l’illiquidité des marchés et créantun effet de « procyclicité » en contradiction avec la mission originelle de la comptabilité (Etienne Boris, PwC).
Au contraire (Philippe Danjou, IASB), la juste valeur a joué son rôle de révélateur de la crise. Elle n’entraîne pas une véritable« procyclicité ». Si le marché ne donne plus la juste valeur, il convient de corriger la valeur de marché et d’utiliser des modèles.

• La réponse à lacrise en matière comptable doit être mondiale et coordonnée entre l’IASB et le FASB (P. Danjou). Mais la comptabilité ne peut échapper à la règle générale de toute société démocratique dans laquelle les principes sont avalisés par le système politique (M. Prada), en particulier si celui-ci juge que l’intérêt public n’a pas été suffisamment pris en compte(J-F. Lepetit).

• L’IASB a permis dereclasser certains actifs financiers évalués à la juste valeur (P. Danjou). Maintenant il faut étudier en profondeur le principe de la juste valeur (J-F. Lepetit), car la comptabilité ne peut ignorer les modèles économiques et modes de gestion
des entreprises (E. Boris).

La juste valeur à l’épreuve de la crise : amplificateur de crise ou élément de bonne gestion et restaurateur de confiance ? Latransparence par l’utilisation de la juste valeur n’a-t-elle pas montré ses limites ?

• La juste valeur n’a pas été, en soi, un phénomène aggravant de la crise. Le débat autour de la juste valeur se pose dès lors que le marché n’est plus efficient ou liquide. (Michel Prada)

Michel Prada considère que l’adoption de la juste valeur n’a pas été, en soi, un phénomène aggravant ou déclencheur de lacrise. Dans une économie de marché il est légitime d’avoir une philosophie de marché. Lorsque les marchés sont efficients, profonds, liquides, les valeurs de marché sont des références difficilement contournables. Pour preuve, certaines crises se sont produites dans le passé avec des systèmes comptables en valeur historique. C’est le cas, par exemple, de la crise financière au Japon dans lesannées 90.

En revanche, le débat autour de la juste valeur se pose dès lors que le marché n’est plus efficient ou liquide. Il convient, par exemple, de s’interroger sur la pertinence du marché de la titrisation, composé de mécanismes apparents de cotation dans certaines juridictions pour fournir une référence. Sur ce marché, il n’existait pas de marché secondaire, pas d’échange, pas de transaction,pas de système de règlement-livraison, ni même de transparence post-marché.

En outre l’interprétation des valeurs de marché a vraisemblablement été beaucoup trop loin, en considérant comme juste valeur par exemple une évaluation faite par un broker, mais qui ne s’engage pas à réaliser l’opération. Dans certaines circonstances, l’élargissement du recours à des modèles d’évaluation aurait étéraisonnable.

• La juste valeur a un effet multiplicateur de volatilité du marché. En outre, le prix de marché s’écarte des valeurs fondamentales en cas de marché illiquide. (Jean-Francois Lepetit)

Jean-François Lepetit fait trois constats :
– La juste valeur génère une « procyclicité » mécanique. En effet, le prix du marché mesure des flux qui sont limités et instantanés, et via le principed’évaluation à la juste valeur, il transmet cette valeur aux stocks. La juste valeur a, par définition, un effet de levier en fonction des montants respectifs des flux et des stocks. Si le marché est volatile, la juste valeur transmet la volatilité à la totalité des stocks. La juste valeur a donc un effet multiplicateur de volatilité, et influence ainsi le comportement des acteurs.
– La juste…