La place du travail dans l’identité des personnes

Vie sociale

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La place du travail dans l’identité des personnes
Hélène Garner, Dominique Méda*

Le travail est, après la famille, l’un des composants essentiels de l’identité. La place et l’importance que lui accordent les individus dépendent néanmoins très fortement de leur catégorie socioprofessionnelle et de leur situation familiale. Si, pour les cadres et les indépendants, le travailest une activité très importante, vecteur d’épanouissement et de réalisation personnels, cela est beaucoup moins le cas pour les employés et ouvriers, notamment peu qualifiés. Si le fait d’avoir des enfants relativise l’importance accordée au travail pour l’ensemble des hommes et des femmes, cela est beaucoup plus vrai des femmes non cadres, pour lesquelles la présence d’enfants rend difficile laconciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Elles peuvent, dès lors, être conduites au retrait d’activité.

rois enquêtes récentes confirment que la famille constitue pour les individus « le pilier des identités » (Bréchon 2000 ; Baudelot et Gollac 1997 et Houseaux 2003). Dans l’enquête Histoire de vie – Construction des identités, 86 % des personnes interro-

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gées indiquenten effet que la famille fait partie des trois domaines qui permettent le mieux de dire qui elles sont (figure 1, encadré) . Elle est de loin le plus souvent citée en premier et l’activité professionnelle ou le statut ont peu d’influence sur ce constat. Les personnes vi-

vant en couple et ayant des enfants sont les plus nombreuses à choisir la famille comme composante majeure de leur identité ;les personnes seules sont encore 60 % à partager cette même valeur. Le travail vient, assez loin derrière, en seconde position.

* Hélène Garner est chargée d’études et de recherche, à la Mission Animation de la Recherche à la Dares et Dominique Méda était, au moment de la rédaction de cet article, responsable de la Mission Animation de la Recherche à la Dares.

Données sociales – La sociétéfrançaise

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édition 2006

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Vie sociale
Le travail, une valeur fondamentale juste après la famille
40 % des personnes interrogées, qui comprennent non seulement des actifs occupés mais également des retraités, des personnes au foyer, des inactifs et des étudiants, et 54 % des seuls actifs occupés citent « le métier, la situation professionnelle, les études » au moins une fois dansles trois principaux composants de leur identité (figure 2). 7 % le choisissent comme premier constituant de l’identité. Le fait d’être en emploi ou de faire des études est déterminant dans ce choix : les actifs occupés et les étudiants sont deux fois plus nombreux que les retraités, les chômeurs, les personnes au foyer et les autres inactifs à donner cette réponse dans l’un de leur trois premierschoix. Toutes choses égales par ailleurs, la probabilité d’appartenir aux 7 % de personnes qui citent le travail en premier, et considèrent donc que c’est leur métier, leur situation professionnelle ou leurs études qui les définit le mieux, est plus forte si l’on est actif occupé, si l’on a fait des études supérieures, si l’on appartient à la tranche des 10 % ayant les revenus les plus élevés, sil’on appartient aux catégories « cadres et professions intellectuelles supérieures» ou « indépendant » et si l’on est sans enfant de moins de 11 ans (figure 3) (Garner, Méda, Sénik, 2005). Du point de vue de la place du travail dans l’identité, une frontière très nette sépare donc deux groupes : les cadres et les indépendants, pour lesquels le travail (le métier, la situation professionnelle, lesétudes) est un fort composant de l’identité, et les
Données sociales – La société française

Figure 1 – L’identification prédominante à la famille
Pourcentage des personnes ayant cité au moins une fois le thème

Votre famille Votre métier, votre situation professionnelle, vos études Vos amis Une passion ou une activité de loisirs Les lieux auxquels vous êtes attachés Vos origines…