Le pere goriot, le monologue de vautrin

LE PERE GORIOT
P123-124 le monologue de Vautrin.

Le passage que nous allons étudier se trouve au début de la deuxième partie du roman de Balzac, Le père Goriot. Eugène de Rastignac est heureux, il vient de recevoir de l’argent de sa mère et de ses deux sœurs. Il va pouvoir faire son entrée dans le monde parisien. Mais comme l’on a pu le voir dans la premièrepartie, Rastignac manque d’expérience. Il demande donc conseil à sa cousine Madame de Beauséant. Cependant, c’était sans compter sur le diabolique Vautrin. En effet, celui-ci, jouant le rôle du mauvais père, contrairement au bon père Goriot, entend se mêler de cette situation en profitant de l’ambition de Rastignac. Dans ce passage, Vautrin est sur le point de dévoiler son plan diabolique etessaie de persuader Rastignac au moyen d’un long monologue d’être complice du meurtre du frère de Victorine afin d’hériter de la fortune de celle qui pourrait devenir sa future épouse.
I/ Portrait d’un homme éclairé mais débordant d’ambition.
Vautrin, dans un très long monologue, commence par se raconter à un Rastignac très impressionné par ce personnage mystérieux etcharismatique. Vautrin se présente alors comme un homme qui a de l’expérience comme pour légitimer la leçon de vie qu’il donne au jeune Rastignac. Il met en avant les blessures de son passé qui lui ont permis d’avancer et d’être l’homme qui se tient aujourd’hui devant lui. « J’ai eu des malheurs» (ligne 4). Cela lui apporte également la sympathie du lecteur qui, malgré les révélations qui suiventplaint cet homme qui a souffert par le passé. Vautrin se présente également à Rastignac comme un homme bon qui est prêt à tout pour les personnes qui sont chères à son cœur blessé. «Je suis bon avec ceux qui me font du bien ou dont le cœur parle au mien » (lignes 8,9). Il dit qu’il leur pardonne toutes leurs fautes commises envers lui. « A ceux-là, tout est permis, ils peuvent me donner des coups depied dans les os des jambes sans que je leur dise : prends garde ! » (lignes 9, 10, 11, 12). Cette phrase laisse aussi entrevoir l’expérience du personnage. Il continue de jouer la carte de la sympathie afin de mieux préparer Rastignac et le lecteur à ce qui va suivre. Puis, Vautrin commence lentement à introduire son côté sombre, en se présentant à Rastignac comme un homme courageux qui ne craintpas de se faire respecter. « Mais nom d’une pipe! Je suis méchant comme le diable avec ceux qui me tracassent, ou qui ne me reviennent pas ». (lignes 12, 13, 14)
Enfin, il en vient aux choses sérieuses en passant du simplement « méchant » pour se faire respecter ou quand les personnes « ne [lui] reviennent pas » (ligne 14) à meurtrier. « Et il est bon de vous apprendre que je me soucie de tuer unhomme comme de ça ! » (lignes 14, 15). Cette citation marque un tournant dans le discours de Vautrin. Cependant, on peut dire que celui-ci a très bien articulé son discours car il n’est pas fait mention que Rastignac se révolte ou quitte la terrasse. Il atténue par la suite son discours afin justement de ne pas trop perturber le jeune Rastignac avec cette révélation. « Seulement, je m’efforce dele tuer proprement quand il le faut absolument. » (lignes 16, 17) L’utilisation de l’adverbe « proprement » (ligne 17) peut sembler ironique dans cette phrase, mais il démontre la volonté de Vautrin de continuer à se faire passer pour un homme civilisé et respectable. Il va plus loin en se comparant à « un artiste » (ligne18). En effet, ce nom peut également sembler ironique en étant associé àcelui de meurtrier, mais là encore il ne fait que servir l’argumentation de Vautrin qui est en train de persuader son jeune interlocuteur inexpérimenté du bien fondé de ses intentions. « Je suis ce que vous appelez un artiste. J’ai lu les Mémoires de Benvenuto Cellini, tel que vous me voyez, et en italien encore. J’ai appris de cet homme-là, qui était un fier luron, à imiter la Providence qui nous…