Niangadou

L’erreur : vice du consentement
Définie comme une représentation inexacte de la réalité contractuelle, l’erreur a pour sanction naturelle (mais pas unique) la nullité de la convention. Il reste alors à déterminer avec quelle facilité et selon quelles conditions doit intervenir l’annulation effective.
À cet égard, deux séries de considérations s’affrontent. D’un coté, l’autonomie de la volontéincite à sanctionner toute erreur ayant déterminé le consentement, quel qu’ en soit l’objet, quels qu’en soient les caractères et quel que soit l’état d’esprit des parties. D’un autre coté, le souci de stabilité contractuelle et de sécurité juridique conduit au contraire à limiter les hypothèses d’annulation. À ces préoccupations utilitaires s’ajoute en outre la nécessité morale de tenir compte del’attitude des contractants : l’annulation heurterait l’équité si elle intervenait alors même que la déception de l’errans procède de sa seule légèreté ou d’une attente tellement inhabituelle que son cocontractant ne pouvait même pas en soupçonner le risque.
Ces hésitations ont marqué le droit positif. Le code ne consacre à l’erreur qu’un texte, au surplus rédigé sous une forme négative :l’article 1110 exclut la nullité sauf si l’erreur tombe « sur la substance même de la chose » ou dans certains contrats sur la personne du cocontractant.
C’est par conséquent la jurisprudence qui, dans le dessein d’assurer la protection du consentement et la moralisation du contrat, a dû travailler à l’élargissement de l’erreur cause de nullité. Elle l’a fait, dans le respect formel des termes de la loi,en donnant une interprétation extensive et subjective de la notion d’erreur sur la substance. Les tribunaux cependant ont su assigner à leur audacieuse construction les limites nécessaires : seule l’erreur portant un certain objet et présentant certains caractères est justifiable du régime approprié.
§1 Objet de l’erreur
A Erreurs prévues par la loi
1 erreur sur la substance
L’erreur sur la substance est prévue par l’article 1110 al 1er du code civil : « l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet ». Malgré la formulation limitative du texte, le mot substance est assez vague pour qu’une interprétation extensive puisse ériger ce type d’erreur en catégorie ouverte, apte à recevoir touteerreur méritant une sanction. C’est ainsi que procède la jurisprudence qui étend le domaine de la substance tant par la notion subjective qu’elle en adopte que par l’appréciation concrète qu’elle en fait.
a) Notion de substance
L’article 1110 du code civil visant la substance même de la chose qui est l’objet du contrat, la sanction de l’erreur semble soumise àune double condition : d’une part, que la méprise ait pour objet une chose matérielle ; d’autre part, que la méprise porte sur la matière dont la chose est faite. En réalité aucune de ces conditions n’est exigée en droit positif.
En premier lieu, la nullité peut être invoquée, alors même que l’erreur ne porte pas sur une chose matérielle. À la substance de la chose, la jurisprudence assimile eneffet la substance de la prestation ou de l’engagement, voire la condition substantielle du contrat. Ce qui est sanctionné est en définitive l’erreur substantielle, considérée en elle même et indépendamment de son objet.
De là découlent deux conséquences : d’une part, il importe peu que la méprise porte non sur une chose mais sur un bien incorporel, sur un droit personnel que l’on croyait tenirdu contrat, ou même sur l’obligation que l’on croyait avoir de le conclure ; d’autre part il importe peu que le contrat lui-même n’ait pas pour objet une chose corporelle : il faut en effet souligner que l’article 1110 s’applique à toute convention quel qu’en soit sa nature ou son objet. Surtout, en second lieu, la nullité peut être invoquée alors même que l’erreur relative à une chose porte…