Nuits sonores

La scène électronique française a 20 ans, et des poussières. Pas d’anniversaire annoncé, mais une vraie et belle réunion de famille en vue, à Lyon, du 12 au 16 mai. Pour sa huitième édition, le festival Nuits sonores a réuni, sans même le préméditer, toutes les générations d’artistes peuplant cette planète depuis l’aube des années 1990, quand un DJ nommé Laurent Garnier passait les premiersdisques de house et de techno sur les platines du Boy, un petit club gay de Paris.
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A Lyon en 2010, entre les scènes du festival in et celles du off (les parcours électro du jeudi), il y aura donc le père, Laurent Garnier. Ses enfants, Vitalic, Agoria, Chloé… Et les petits-enfants, Yuksek, Uffie, DantonEeprom… En fait, trois générations, « la pionnière, la militante et la communautaire », résume Agoria, la trentaine, parrain officiel des Nuits sonores.

On pourrait les dater grossièrement ainsi : 1990-1998, 1999-2005, 2006-2010. « Ce sera marrant, dit-il, de voir si les fans de Yuksek (20 ans de moyenne d’âge) dansent au concert de Garnier. » Les premiers sont adeptes d’une électro bondissante. Lesecond explore désormais les territoires du jazz.

Il est rare qu’un festival fédère à ce point la scène. Comme si l’histoire de Lyon et de sa région, foyer de la révolution techno en France au même titre que Paris, favorisait ce genre de rassemblements. « Ici, il y a presque vingt ans, des gens comme Milosh, Oxia, Tonio ont éduqué tout un public à ces nouvelles musiques, rappelle Agoria. Al’époque, ils prenaient le risque de finir au poste tous les week-ends. On les oublie souvent. Je les respecte infiniment. »

C’était entre 1990 et 1995, ces musiques avaient très mauvaise presse. Aujourd’hui, les Nuits sonores reçoivent le maire, les subventions de la ville. Et mercredi, Oxia jouera sur une grande scène.

Uffie, 22 ans, n’a rien connu de tout cela. Américaine arrivée à Paris àl’âge de 15 ans, elle appartient à la génération communautaire aussi appelée French touch 2.0. Une référence à la première French touch (celle de Daft Punk, Air ou Etienne de Crécy en 1995-1998), mais aussi au Web 2.0, cette toile des réseaux sociaux, tels Myspace et Facebook, indissociable du succès de cette scène.

Emmenée par le duo Justice et le label Ed Banger (fondé par Pedro Winter, le managerdes Daft Punk), la French touch 2.0 a fait danser toute la planète ces cinq dernières années. Leur marque irrésistible : vêtements fluo, musique saturée et hystérie collective. Uffie en a été l’égérie nocturne. Des grands anciens, elle connaissait les Daft Punk, « et c’est tout ». Pour le reste, sa vie tenait en trois mots : « Fun, fun, fun. »

L’ex-ado clubbeuse prend aujourd’hui un nouveaudépart. Uffie est devenue maman, il y a cinq mois. Et elle a enfin terminé son premier album, Sex Dreams & Denim Jeans. Un bonbon électro, pop et rap très acidulé, plus posé aussi, comme elle désormais. Il a été réalisé par Mirwais, producteur pour Madonna, mais avant cela membre de Taxi Girl, groupe phare des années 1980, et par Feadz, tête brûlée des années 2000. Se sent-elle un peu française quandelle joue à l’étranger ? Non, même si elle est « à la maison », chez Ed Banger. Uffie, à l’image de toute sa génération voit le monde « comme un grand terrain de jeu ». Samedi soir, à Lyon, pourquoi pas le lendemain à Milan, pour un brunch.

En ce sens, elle est bien l’héritière d’un mouvement musical qui, parce qu’essentiellement instrumental, s’est toujours moquée des frontières. Issu de la…