Philo
QU’EST-CE QUI FAIT LA FORCE DES RELIGIONS ?
Croire ce n’est pas savoir. Mais la science ne peut répondre à tout et l’homme a besoin de trouver des réponses pour donner un sens à sa vie.
La religion lui apporte des réponses, et d’abord une réponse qui le rattache a la collectivité : tout comme il appartient à une communauté sociale, l’homme n’est plus seul, il appartient à une communautéspirituelle.
• À cette appartenance collective s’ajoute le soutien moral individuel qu’est la consolation. L’homme, angoissé par l’idée de la mort, se tourne vers cette puissance protectrice et consolatrice qu’est la religion.
• Mais si la force de la religion tient bien à sa puissance sur la raison qui est mise en échec, et si elle peut abuser de ce pouvoir jusqu’à tuer au nom de laspiritualité, sa force est aussi cette aspiration proprement humaine à se transcender dans une quête de l’absolu.
La force des religions ne tient-elle pas:
– à la foi de ceux qu’elles regroupent et dont elles cumulent les forces?
– à ce qu’elles donnent des réponses aux grandes questions que les hommes se posent sur leur origine, leur destination, la mort…
– à ce qu’elles satisfont les trois désirsde l’enfant: immortalité, sécurité… la religion serait illusion, satisfaction imaginaire de trois désirs de l’enfance:
– la curiosité (d’où est-ce que je viens?),
– l’aspiration à la sécurité,
– l’exigence d’immortalité:
seule l’imagination peut combler trois désirs impossibles à satisfaire réellement (pas de connaissance définitive, pas de vie sans risque, pas de mort sans doute).Une Genèse, un Dieu protecteur, père tout puissant, une âme immortelle animent le discours de la religion.
N’importe quelle religion est la déclaration qui surpasse profondément l’homme. Il n’y a pas de société sans un rapport, sinon au divin, du moins au sacré. L’homme est un être qui s’invente des dieux, en tout cas qui semble avoir besoin d’eux. Pourquoi ?
1. Une ou des religions ?
Leconcept de religion nous embarrasse : notre sens de la multiplicité nous fait volontiers accepter la présence des religions ou plus généralement des phénomènes religieux dans les sociétés humaines, mais nous rechignons à parler de la religion. L’uniformité nous semble, ici comme ailleurs, dangereuse et totalitaire. Cependant, même les étymologies supposées semblent nous mettre sur la voie de lavocation qui unifie la religion: selon Cicéron, religio viendrait de legere (c’est-à-dire « cueillir, ramasser » mais aussi « lire ») ; les auteurs chrétiens l’ont rattachée à religare (« relier »). La religion implique : d’une part, une mise en relation des individus, entre eux et avec une entité ou un être dont ils dépendent fortement ; d’autre part, une attitude de l’individu pris en lui-même, unmouvement de son intériorité, un scrupule qui lie sa conscience et impose des formes à son comportement.
2. De la réalité sociale à la transcendance
Sous un premier aspect, la sociologie essaye de décrire la religion comme un fait social. Indépendamment de toute idée de divinité, on a ainsi remarqué (avec Durkheim) une classification des choses, réelles ou idéales, en deux genres opposés : leprofane (qui relève des données de l’expérience commune) et le sacré (le tabou, la censure de l’inceste : relations sexuelles entre des proches parents, etc.). Les rites de purification visent à empêcher la contamination du groupe entier par la saleté, celle-ci venant par exemple d’un objet ou d’un animal qui joue un rôle odieux dans un mythe, ou de la sexualité.
Cela dit, la religion ne peutmanquer de se développer en discours et en théorie, sous la forme de prescriptions systématiques, de dogmes qui expriment les vérités essentielles, de théologie pour offrir une approche et une sorte d’appréciation du mystère inaccessible. Un tel discours de vérité suppose des méthodes de vérification, ou au moins d’authentification, qui ne sont pas comparables à celles de la science quand l’objet…