Sujet bts blanc sur le thème « génération(s) »

Les conflits entre père et fils.

Vous rédigerez une synthèse objective et ordonnée des documents suivants.
• Document n°1. :
Extrait de Totem et tabou (IV, 5), de Sigmund Freud, Gallimard, 1913 (traduction Samuel Jankélévitch).
• Document n°2 :
Extrait de Dom Juan, de Molière, 1665.
• Document n°3.
Extrait de Mémoire de ma mémoire, de Gérard Chaliand, Julliard, 2003.

• Document n°1.:
Au début du XXe siècle, dans une réflexion associant psychanalyse et anthropologie, Sigmund Freud (1856-1939) explique l’origine de deux tabous fondamentaux, le parricide et l’inceste. Dans Totem et tabou (1913), il analyse les rituels autour de la consommation collective de l’animal totem considéré comme l’ancêtre d’un clan dans les sociétés traditionnelles. Il voit dans ce rituel le rappeld’un meurtre archaïque, celui du père mythique tout puissant. Ses fils, en rivalité avec lui, l’auraient tué pour substituer à l’ordre qu’il imposait une autre forme de pouvoir, celle qui s’exprime dans l’ordre social et les religions propres à toute culture.

Représentons-nous maintenant la scène d’un repas totémique, en y ajoutant quelques traits vraisemblables dont nous n’avons pu tenir compteprécédemment. Dans une occasion solennelle, le clan tue cruellement son animal totémique et le consomme tout cru — sang, chair, os ; les membres du clan sont vêtus de façon à ressembler au totem dont ils imitent les sons et les mouvements, comme s’ils voulaient faire ressortir leur identité avec lui. On sait qu’on accomplit une action qui est interdite à chacun individuellement, mais qui estjustifiée dès l’instant où tous y prennent part ; personne n’a d’ailleurs le droit de s’y soustraire. L’action accomplie, l’animal tué est pleuré et regretté. Les plaintes que provoque cette mort sont dictées et imposées par la crainte d’un châtiment qui menace et ont surtout pour but […] de soustraire le clan à la responsabilité du meurtre accompli.
Mais ce deuil est suivi de la fête la plusbruyante et la plus joyeuse, avec déchaînement de tous les instincts et acceptation de toutes les satisfactions. Et ici nous entrevoyons sans peine la nature, l’essence même de La Fête.
Une fête est un excès permis, voire ordonné, une violation solennelle d’une prohibition. Ce n’est pas parce qu’ils se trouvent, en vertu d’une prescription, joyeusement disposés, que les hommes commettent des excès :l’excès fait partie de la nature même de la fête ; la disposition joyeuse est produite par la permission accordée de faire ce qui est défendu en temps normal.
Mais que signifie le deuil qu’on éprouve à la suite de la mort de l’animal totémique et qui sert d’introduction à cette fête joyeuse ? Si l’on se réjouit du meurtre du totem, qui est un acte ordinairement prohibé, pourquoi le pleure-t-onégalement ?
Nous savons que les membres du clan se sanctifient par l’absorption du totem et renforcent ainsi l’identité qui existe entre eux, et leur identité avec lui. La disposition joyeuse et tout ce qui en découle pourrait s’expliquer par le fait que les hommes ont absorbé la vie sacrée dont la substance du totem était l’incarnation ou, plutôt, le véhicule.
La psychanalyse nous a révélé quel’animal totémique servait en réalité de substitut au père, et ceci nous explique la contradiction que nous avons signalée plus haut : d’une part, la défense de tuer l’animal ; d’autre part, la fête qui suit sa mort, fête précédée d’une explosion de tristesse. L’attitude affective ambivalente qui, aujourd’hui encore, caractérise le complexe paternel chez nos enfants et se prolonge quelquefois jusquedans la vie adulte, s’étendrait également à l’animal totémique qui sert de substitut au père.
En confrontant la conception du totem, suggérée par la psychanalyse, avec le fait du repas totémique et avec l’hypothèse darwinienne concernant l’état primitif de la société humaine, on peut acquérir une compréhension plus profonde et on entrevoit la perspective d’une hypothèse qui peut paraître…