Antiparlementarisme france

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Les droites françaises ont-elles été tentées
par le fascisme
dans les années trente?

Selon l’historien israélien Zeev Sternhell, le fascisme s’est enraciné dans l’entre-deux-guerre dans de larges secteurs de la société française. Selon lui, comme selon les premiers théoriciens du fascisme du fascisme tels Georges Sorel, cette idéologie de “troisième voie” était indépendante du clivagedroite / gauche, alliant le nationalisme au socialisme. Mais à l’image du régime mussolinien ou du Faisceau de Valois dans les années vingt, la notion de fascisme resta “embourbée” à droite. Il semble donc qu’il faille préciser la définition du fascisme avant de s’interroger sur l’intérêt qu’il a suscité dans les droites françaises. L’abandon des principes révolutionnaires par Mussolini atransformé le sens originel du terme: l’ordre, la violence, l’autorité du chef et la nation sont valorisés pour lutter contre le libéralisme, le parlementarisme et le communisme. Mais malgré la dérive de la notion vers la droite, l’idéologie semble encore éloignée de l’ultra-droite traditionnelle et encore plus de la droite libérale. Pourtant, l’une comme l’autre ont semble-t-il été tentées par lefascisme dans les années trente.
Ce constat nous amène à une double interrogation:
Les droites ont-elles voulu réellement dépasser le stade du premier fascisme (c’est-à-dire la contestation) pour détruire la République ou ont-elles simplement cherché à profiter de l’influence fasciste dans la société pour mieux régénérer la démocratie “essoufflée”?
D’autre part, la fascisation de la droite françaiseétait-elle la résultante d’une mode européenne ou la résurgence d’un passé national? Ainsi, les mouvements dits “fascistes” l’étaient-ils réellement?

I. Les droites françaises n’ont pas echappé à la propagation de l’idéologie fasciste

A) Le fascisme se nourrit de l’antiparlementarisme

1) La poussée ligueuse
Les ligues se multiplient et prennent de l’importance dans le jeu politiquedès le retour au pouvoir de la gauche en 1932. Ces groupes d’action directe, refusant le cadre parlementaire et imposant leurs idées dans la rue profitent d’une crise économique, sociale et institutionnelle pour devenir le principal levier populiste visant à déstabliser le pouvoir politique. Ces ligues deviennent, notamment aux yeux de la gauche, le principal terreau du fascisme, d’autant plus que,phénomène nouveau, elles sont attirées par les régimes fascistes européens. Par ailleurs, l’extrème-droite fascisante récupère rapidement “l’esprit national” des Anciens Combattants en prônant la restauration de l’autorité. Ainsi, la principale ligue nationaliste, les Croix-de-Feu, opère un tournant décisif en 1931 avec l’arrivée de de La Rocque à sa présidence.

2) Le 6 Fevrier 1934, putsch ouémeute?
Cette poussée de l’antiparlementarisme s’est cristallisée dans une émeute le 6 Fevrier 1934. La quinzaine de victime lors de cet évènement a contribué à imposer la certitude que le régime républicain était menacé de l’intérieur par des organisations fascisantes. Mais cette intimidation réussie contre le gouvernement se fit sans les Croix-de-Feu et sans coordination des manifestants.L’importance de l’émeute réside donc dans la prise de conscience par la droite parlementaire de son intérêt à tirer profit de l’antiparlementarisme: en effet, même si l’ultra-droite dénonça la récupération du 6 Fevrier par la “droite molle”, Doumergue, Tardieu, Laval et Pétain formèrent l’essentiel du gouvernement suivant.

3) L’antiparlementarisme dans la droite modérée
De nombreux militants etplusieurs conseillers municipaux de droite classique (dont certains rencontrèrent Taittinger, leader des Jeunesses Patriotes) participèrent au coup de force provoquant la démission de Daladier. En novembre 1934, G.Doumergue assista à un défilé des Croix-de-Feu coiffé d’un béret de ligueur. D’autre part, Louis Marin engagea sa Fédération Républicaine dans le Front de la Liberté de Doriot….