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Description[modifier]
Sur le tableau figurent trois femmes, une vieille et deux jeunes, parmi les plus pauvres de la campagne, puisque contraintes de glaner des épis de blés pour manger, et illustre ainsi la misère de la population rurale en s’inscrivant dans la veine réaliste, sans misérabilisme[1]. Les trois femmes figurent les trois gestes du glanage : se baisser, ramasser, se relever. Letravail de ses femmes est pénible (courbure du dos, maigreur de la récolte), mais leurs vêtements ne sont pas des haillons[2]. Cette pauvreté (et une certaine fracture sociale) est accentuée par l’apparente richesse de la récolte de blé chargée sur les charrettes en arrière plan par le maître et les gens de ferme. Millet représente dans le ciel une nuée d’oiseaux, prêts eux aussi à picorer les grainsoubliées, à l’instar des glaneuses[1].
Le glanage est un sujet connu à cette époque. Balzac, dans Les Paysans, met en scène le régisseur du comte de Montcornet qui conteste le droit de glaner[3]. Deux ans plus tard, Jules Breton prend le contre-pied de Millet dans Le rappel des glaneuses, où celles-ci sont montrées sans souffrance, dans une ambiance presque festive.
Comme pour son tableauMoissonneurs (1852), Millet a pu en observant les paysannes de Chailly, d’un passage de la Bible, mettant en scène Booz et Ruth, le premier autorisant la seconde à glaner dans son champ, puis à partager le repas des travailleurs.
Ce tableau s’inscrit dans une série de peintures de Millet illustrant la vie paysanne[2].
Acheté pour 2000 francs par M. Binder, de l’Isle-Adam, sur les conseils de JulesDupré[4], Des glaneuses est entré dans la collection du Louvre en 1890 grâce au don de Mme Pommery, et a été affecté au Musée d’Orsay en 1986.

Critiques de 1857[modifier]

Pour les critiques de droite, ces femmes sont le symbole d’une révolution populaire menaçante, quand les journaux de gauche y voient le peuple rural appauvri par le Second Empire.
• « Ses trois glaneuses ont desprétentions gigantesques : elles posent comme les trois Parques du paupérisme. Ce sont des épouvantails de haillons plantés dans un champ, et, comme les épouvantails, elles n’ont pas de visage : une coiffe de bure leur en tient lieu. M. Millet paraît croire que l’indigence de l’exécution convient aux peintures de la pauvreté : sa laideur est sans accent, sa grossièreté sans relief. Une teinte de cendreenveloppe les figures et le paysage ; le ciel est du même ton que le jupon des glaneuses ; il a l’aspect d’une grande loque tendue. Ces pauvresses ne me touchent pas ; elles ont trop d’orgueil, elles trahissent trop visiblement la prétention de descendre des sibylles de Michel-Ange et de porter plus superbement leurs guenilles que les moissonneuses du Poussin ne portent leurs draperies. Sous prétextequ’elles sont des symboles, elles se dispensent de couleur et de modelé. Ce n’est pas ainsi que je comprends les représentations de la misère, « chose sacrée », dit le poète latin, — sacrée et naive. L’art doit la peindre sans emphase, avec émotion et simplicité. Il me déplaît de voir Ruth et Noémi arpenter, comme les planches d’un théâtre, le champ de Booz. » Paul de Saint-Victor[4]
•« Millet peint avec une austère simplicité des sujets simples. Quoiqu’il étudie la nature d’assez près pour savoir le fin du fin, il ne se laisse pas aller au péché mignon des observateurs subtils; il échappe à la tentation de tout dire à la fois, et vous ne trouverez jamais chez lui cette multiplicité d’intentions, ce caquetage de détails qui fatigue dans les œuvres de M. Meissonier. Ses tableauxpéchaient même par un excès de sobriété, et l’on pouvait croire que M. Millet, à force de réduire la nature à sa plus simple expression, se trouvait, comme un alchimiste imprudent, devant un creuset vide. Mais les Glaneuses de 1857 se distinguent des œuvres précédentes par cette abondance dans la sobriété qui est la marque des talents achevés et la signature commune des maîtres. Le tableau vous…