La ville-art

?Aujourd’hui les murs de nos villes sont recouverts par les panneaux publicitaires que beaucoup considèrent comme une pollution visuelle. C’est un univers visuel qui quotidiennement s’impose aux habitants de la ville sans rien leur apporter en contrepartie qu’une vague distraction. « Le temps de cerveau disponible » des passants, pour reprendre une expression du patron d’une grande chaîne detélévision, me semble aujourd’hui très mal utilisé.
Les murs ou les trottoirs, aujourd’hui mal exploités ou inexploités, offrent dans la ville un immense espace d’information, de communication, d’expression, qui pourrait être bien davantage alloué à la culture ou à l’art, avec pour conséquence un bénéfice certain pour les habitants.

Le mouvement Street Art, qui vit un vrai essor ces dernières annéesdans les villes du monde entier, me paraît l’embryon d’une grande révolution potentielle dans la vie quotidienne des citadins de demain.
Aujourd’hui un simple lieu de passage sans âme, demain la rue pourrait s’installer au coeur des activités de notre vie quotidienne comme un lieu d’enrichissement culturel et de partage, un lieu où les possibilités offertes sont multiples.

Apporter de lafraîcheur dans l’espace publicitaire en laissant régulièrement la place à des artistes de s’exprimer librement est une idée attrayante qui n’est plus seulement une fiction depuis les années 1980. Le collectif « Une Nuit » créé autour de l’artiste Jean Faucheur organisait des raids artistiques la nuit en recouvrant les espaces pub de tout un quartier d’oeuvres de street art. Devenue en 2003 « Le Mur »(Modulable, Urbain, Réactif), elle a finalement obtenu de la mairie du quartier un espace de 3m sur 8m sur lequel l’association fait la promotion de l’art contemporain et plus particulièrement de l’art urbain. Toutes les deux semaines un artiste s’y exprime librement.
J’ai suivi et photographié dans l’atelier de Jean Faucheur le processus de création du dernier en date « Titi from Paris ».
Cetteassociation admirable, au succès grandissant, révèle la possibilité d’une utilisation plus culturelle des murs de notre ville.

En plus du divertissement au sens noble qu’apporteraient de belles oeuvres graphiques dérivées du street art, on pourrait par exemple envisager des affiches-journaux quotidiennes qui proposent aux gens des contenus culturels comme des reportages sur le travaild’artistes contemporains ou bien des rétrospectives sur des artistes passés. L’occasion nous étant alors donnée de nous divertir et de nous cultiver entre deux stations dans le métro, au lieu d’être nez à nez avec une énième affiche femme-objet vendant je ne sais quel produit de grande consommation.
Le principe de l’affiche-journal est intéressant de par la nouveauté qu’il apporte dans l’exploitation d’unformat d’aussi grande taille.
L’affiche-journal doit à la fois rassembler plus de contenu qu’un simple message publicitaire et conserver tout de même sa propriété de lecture de loin. Il faut gérer les niveaux de lecture de manière à ce que les titres accrochent les passants et que ces derniers puissent aussi lire le texte courant sans devoir dans un premier temps s’en approcher. Dans un deuxièmetemps un plus petit corps pourrait être réservé pour des articles qui ne seraient lus que par les plus proches ou les plus intéressés.

Cinq minutes d’attente avant l’arrivée du bus ou bien du métro ? Le temps de regarder un des court-métrages d’animation diffusés en continu par les panneaux numériques muraux présents partout dans la ville, — On pourrait même imaginer qu’à l’aide de lunettesparticulières (au statut comparable à notre téléphone portable aujourd’hui) et par une technique informatique ingénieuse, ces écrans projettent à chacun indépendamment le programme qu’il souhaite voir, bien que tous regardent le même écran. — Ou bien le temps d’admirer la naissance de l’oeuvre de cet artiste de rue qui s’attaque au mur de la rue dédié à la création. Ou bien tout simplement…