Le silence ne dit-il rien?

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Le langage est une faculté, celle de pouvoir communiquer une pensée au moyen de signes. C’est donc un système de communication, mais c’est également un système qui suppose une conscience, un sujet pensant. De plus, le langage n’est pas seulement un moyen de faire connaitre sa pensée, c’est aussi par lui que nous pensons. Alors que la parole est un outil clé du langage, le silence, lui, nedit-il rien pour autant ? Le silence, en tant qu’absence de mots, engendre-t’il nécessairement une absence de communication ?

Par définition, dire signifie exprimer, signifier faire connaitre, ce qui renvoie donc nécessairement à un contenu. Parler, dire quelque chose, c’est émettre une intention de signification. Dire quelque chose nécessite l’usage de la parole et non l’usage du silence.Syntaxiquement le silence semble donc ne rien pouvoir dire et engendre donc une absence de communication. Cette position est bien illustrée par les propos de Maurice Merleau-Ponty qui a déclaré, dans son œuvre Le visible et l’invisible, que « le langage réalise en brisant le silence, ce que le silence voulait et n’obtenait pas ».
Par exemple, lorsqu’un être dort, il ne parle pas, il dort donc ensilence. Le silence peut donc être, en quelque sorte, un besoin vital, qui ne traduit pas une idée, un état d’esprit, mais un repos physique et mental.
Si nous prenons l’exemple du vote, le silence est alors représenté par une abstention de vote. Rien n’est alors dit sur les attentes des individus n’ayant pas votés, il y a donc dans cette situation aussi, une absence de communication engendrée par unsilence.
Aussi, la parole est un élément clé de la vie en société. On peut remarquer qu’un individu timide, peu bavard, sera souvent mal à l’aise en société, du fait de sa difficulté à communiquer avec les autres. Le silence peut donc souvent être un obstacle à la sociabilité d’un individu.

Si le silence peut paraitre ne rien dire, il peut en fait traduire beaucoup de choses, telles que despensées, des sentiments. Nous allons voir que s’il est bien interprété, il peut alors devenir un moyen de communication.
Karl Von Frisch a ainsi démontré que la danse des abeilles était un moyen de communication. En effet elles sont capables, à l’aide d’une danse, d’indiquer la distance et la direction d’une ruche.
De plus, le silence n’est pas un obstacle total à la communication d’un muetpuisqu’il est capable, à l’aide de la langue des signes, de manifester ce qu’il pense.
Le silence peut être parfois l’expression d’un mal être, d’une gêne ressentie lors de certaines situations, certains évènements, le plus souvent inhabituelles, qui viennent perturber une habitude, une certaine routine. Il remplace alors les mots lorsque l’individu n’est pas en capacité de traduire ses pensées par lelangage, ou qu’il ne sait pas comment réagir face au comportement d’un individu, proche ou inconnu. Il peut alors choisir cette alternative, par exemple par peur d’offenser quelqu’un, avec une remarque, un reproche, qu’il juge inapproprié, délicat à formuler. Le silence devient alors une échappatoire, une solution de replis. Ceci est très souvent le cas aussi dans une situation dite délicate,gênante, lors d’une confession, d’un conflit, ou l’annonce de la mort d’un proche par exemple. Les mots ne sont, dans ces cas-là, pas à la hauteur de nos pensées, de ce que l’on voudrait exprimer. D’après Bergson, notre vie spirituelle intérieure, qui est singulière, ne peut être qu’imparfaitement traduite par des mots, qui sont généraux. Les formes les plus subtiles et les plus profondes de penséeseraient alors ineffable, c’est-à-dire inexprimables par le langage. Aussi l’évènement peut ne pas être pas assez lointain pour avoir suffisamment de recul et avoir une vision claire et structurée de la situation et donc une incapacité à formuler sa pensée. Comme l’a clairement énoncé Friedrich Egel, « si nous ne trouvons pas nos mots parfois, c’est le signe que notre pensée elle-même n’est pas…