Léon gontran damas

|RIMBAUD : Voyelles (1871) |
|[pic] | »Voyelles » est de loin le plus célèbre des poèmes de |Associations et synesthésies |
|Le chant des voyelles |Rimbaud. Il est vrai que cepoème de Rimbaud partage avec | »Voyelles » est le premier poème rimbaldien à |
|A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : |les « Correspondances » de Baudelaire le privilège d’être l’un|mettre en avant l’association comme principe |
|voyelles, |des textes le plus souvent soumis à la réflexion. Tous deux |d’écriture. Chaque lettre éveille de multiples ||Je dirai quelque jour vos naissances latentes|ont cherché à découvrir au-delà des apparences le sens |images, d’impressions visuelles, sonores, |
|: |profond du mystère universel. Rédigé dans les semaines qui |olfactives. Chaque voyelle est illustrée d’un ou |
|A, noir corset velu des mouches éclatantes |suivent les « Lettres du voyant »,recopié par Verlaine et |plusieurs tableaux qui sont autant |
|Qui bombinent autour des puanteurs cruelles, |reproduit dans ses Poètes maudits, le fameux sonnet se prête|d’hallucinations, d’illuminations. Il y en a |
| |évidement à de nombreuses interrogations. |treize (comme les apôtres) dans une sorte de ||Golfes d’ombre ; E, candeurs des vapeurs et |L’alpha et l’oméga |kaléidoscope mettant à contribution tous les |
|des tentes, |Le premier vers fixe les perceptions chromatiques des 5 |sens. Il y a fusion des évocations de couleurs, |
|Lances des glaciers fiers, rois blancs, |voyelles de l’alphabet français,A,E,I,O,U, énumérées ici |d’odeurs, de sons, de mouvements, avec une |
|frissons d’ombelles ; |dans le désordre avec inversion entre le U et le O. Le O |préférence des formes et des sons. « A » prononcé |
|I, pourpres, sang craché, rire des lèvres |final de la série lui fait évoquer l’oméga, la lettre ultime|est un cri d’horreur qui renvoie aux noirceurs, ||belles |de l’alphabet grec. De la première lettre A (alpha), à la |aux puanteurs mais la forme de la voyelle |
|Dans la colère ou les ivresses pénitentes ; |dernière O (Oméga) le système est complet, parfait. Les |rappelle l’abdomen d’une mouche. Ces associations|
| |voyelles sont en majuscules, laconstruction parataxique |rimbaldiennes rappellent les fameuses |
|U, cycles, vibrement divins des mers virides,|(sans lien) avec le mot « voyelles », détaché comme une sorte | »synesthésies » baudelairiennes, comparaisons de |
|Paix des pâtis semés d’animaux, paix des |d’incantation. La syntaxe du poème se compose de quatre |la fraîcheur des parfums à celle des chairs ||rides |distiques (groupe de vers, de même sens) dans l’ordre des |d’enfants, de la douceur des hautbois à celle du |
|Que l’alchimie imprime aux grands fronts |voyelles réalisée par l’artifice de l’enjambement des golfes|vert des prairies. Beaucoup ont cherché un sens, |
|studieux ; |d’ombre. La dernière apostrophe,comme solennelle « – O |à ces étranges associations. « E » blanc, le |
| |l’Oméga rayon violet de Ses Yeux », isolée par le tiret, est |féminin, l’innocence, la pureté est associée à |
|O, suprême Clairon plein des strideurs |le point d’orgue confirmant la vision du « voyant ». Les | »vapeur », « glacier », « ombelles », « I » rouge, de…