Lorsque j’était une oeuvred’art

A. Biographie
a)Éric-Emmanuel Schmitt est né à Lyon en 1960, de parents d’origine alsacienne. Interrogé par un journaliste, il se peint comme un adolescent rebelle, ne supportant pas les idées reçues et parfois victime d’accès de violence. Mais la philosophie, pense-t-il, l’a sauvé en lui apprenant à être lui-même et à se sentir libre.

Ses études l’ont mené à l’École normale supérieure, àl’agrégation et au professorat de philosophie, comme maître de conférence.
Sa carrière de dramaturge débute très tôt, vers l’âge de huit ans, lorsque sa mère l’emmène voir une représentation du Cyrano de Bergerac avec Jean Marais. L’enfant est bouleversé jusqu’aux larmes et le théâtre devient sa passion.
Il se met à écrire : « À seize ans, j’avais compris – ou décidé – que j’étais écrivain, et j’aicomposé, mis en scène et joué mes premières pièces au lycée. »

Pour améliorer son style, il se livre avec fougue et ferveur à des exercices de réécriture et de pastiche, en particulier de Molière.
La Nuit de Valognes (C&C n°61), oeuvre écrite à 29 ans, témoigne encore de ce goût et des réminiscences culturelles emmagasinées par la mémoire. Grâce à l’actrice Edwige Feuillère qui la recommanda àplusieurs metteurs en scène, la pièce fut jouée à la Comédie des Champs-Élysées en 1991. C’est à ce moment-là, alors qu’il est encore professeur de philosophie en Normandie, que le succès de la pièce infléchit sa carrière.

D’autres oeuvres suivirent, parfois couronnées par des prix littéraires au pouvoir médiatique. Certaines entrèrent dans la carrière audiovisuelle ou cinématographique commeLe Visiteur (C&C n°42), créé en 1993, Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran (C&C n°57), créé en 1999 ou Oscar et la dame rose (C&C n°79), porté au cinéma par Schmitt lui-même en 2009.

En juillet 2001, venant récompenser de nombreuses et riches parutions, l’Académie française lui décerne le Grand Prix du Théâtre pour l’ensemble de son oeuvre.

En 2002 est joué sur la scène du théâtre desChamps-Elysées Oscar et la dame rose avec, dans le rôle principal, Danielle Darrieux, rôle ensuite repris par Anny Duperey en 2005-2006.

L’auteur, mélomane passionné d’art lyrique, a également traduit deux livrets d’opéras de Mozart : Les Noces de Figaro en 1997 et Don Giovanni en 2001.

Parallèlement, et de manière plus insistante, Eric-Emmanuel Schmitt s’exerce l’art romanesque. La Secte deségoïstes (1994) lui permet de renouer avec sa formation de philosophe spécialiste du XVIIIe siècle. Un essai, Diderot ou la Philosophie de la séduction, publié en 1997, reprend partiellement le sujet de sa thèse. L’Evagile selon Pilate (2000) et La Part de l’autre (2001) mettent en scène les deux figures les plus emblématiques de l’histoire de l’humanité, le Bien et le Mal absolus, Jésus et Hitler.Éric-Emmanuel Schmitt s’est taillé une belle figure d’écrivain contemporain grâce à une écriture fluide et directe mise au service de thèmes éternels. Comme Michel Tournier, autre écrivain philosophe, il sait donner présence aux figures mythiques les plus populaires: Don Juan, Freud, Dieu, le Christ, Hitler… et enrichir son propos littéraire d’une culture philosophique qui ne manifeste nicuistrerie ni hermétisme.

b) « J’ai toujours écrit des romans et des nouvelles cependant, à la différence des pièces, j’ai mis longtemps à composer un texte que je jugeais publiable. Alors que le théâtre, paradoxalement, m’épanouissait en m’imposant ses contraintes, le roman m’offrait une liberté qui m’a longtemps effrayé, une liberté qui pouvait devenir licence. Pourquoi gribouiller 300 pagesplutôt que 100 ? Jusqu’à quel point décrire ? Quel point de vue adopter ? Fort heureusement, les sujets de mes livres m’ont forcé la main : ils se sont imposés, m’ont obligé à les écouter, à rédiger leur histoire pendant de longs mois, à me mettre a leur service. Merci Pilate, merci Monsieur Ibrahim, merci Oscar. Quant à Adolf Hitler, désolé, même si j’apprécie vraiment La Part de l’Autre, le livre…