Un rêve a. bertrand
Correction du commentaire littéraire « Un rêve » d’A. Bertrand
Poète du XIXe siècle, Aloysius Bertrand était aussi dramaturge et journaliste. Il meurt jeune et peu connu et sa vie de bohême en fait un poète maudit. Il écrit le recueil Gaspard de la nuit à la fin de sa vie, recueil qui sera publié en 1842 après sa mort. De cette oeuvre posthume est extrait le poème intitulé « Un Rêve ». Ce poèmeprésente un songe plutôt angoissant dont le récit mystérieux surprend par le choix de l’écriture poétique : la prose. On peut alors se demander comment la poésie traduit le rêve. Pour répondre à cette question nous analyserons dans un premier temps les aspects qui relèvent du conte fantastique. Dans un second temps, nous étudierons la relation que le poète entretient avec ce rêve. Dans untroisième temps, nous verrons les procédés poétiques de la prose permettant au rêveur de se raconter.
Tout d’abord, le poème fonctionne comme un récit utilisant les ressources du conte fantastique. En effet, le cadre choisi est typique du registre fantastique. La nature est largement évoquée par la présence de la forêt, des feuilles, des branches d’un chêne. Cette forêt, lieu sauvage est associée auxlieux sacrés de la religion: « une abbaye », « le glas funèbre d’une cloche », « la chapelle ardente ». Si ces lieux sont imaginaires, ils côtoient aussi le Morimont, place réelle de Dijon. Ainsi, les lieux différents, réels ou imaginaires installent une atmosphère inquiétante d’autant plus que le récit se situe « la nuit ».
Le choix des personnages contribue à mettre en place une ambianceangoissante. La métonymie « grouillant de capes et de chapeaux » pour définir la population présente sur la place d’exécution, les personnages morts comme le moine ou la jeune fille pendue, offrent une vision d’horreur. Par ailleurs, deux personnages désignés par leur nom : le Prieur Dom Augustin et Marguerite, donnent le sentiment d’une ambiance funèbre confirmée par la répétition de l’adjectif « funèbre »et du champ lexical important de la mort (« le glas », agonisants », le bourreau »). De plus, on ne sait pour quelle raison tous ces personnages sont morts ou à l’agonie, tout comme l’origine des cris et des plaintes restent inconnus. Par ailleurs, la perception auditive des bruits amplifient l’inquiétude notamment par l’opposition entre « les cris plaintifs » qui semblent compatir à la douleur et ‘lesrires féroces » qui semblent se moquer et ajouter une ambiance satanique.
A ces aspects fantastiques, on peut ajouter les critères du conte notamment avec la formule d’ouverture « Il était nuit. » qui rappelle « Il était une fois… ». Le conte est aussi présent par l’emploi des temps du passé qui semblent raconter des actions lointaines dans un passé indéfini tout comme dans le conte. Le passésimple structure le récit par la répétition anaphorique de l’expression « Ce furent… » et compose le récit selon un schéma narratif simple.
Ce récit n’est pas seulement un conte, c’est aussi un poème qui permet au rêveur de transcrire tout un imaginaire onirique.
Les rêves n’ont souvent pas de structure logique mais on observe une volonté de la part du poète d’organiser le récit.L’organisation en paragraphes permise par la prose, offre une unité au poème grâce aux connecteurs chronologiques « D’abord…Ensuite…Enfin… ». On peut aussi voir une unité pour chaque paragraphe : le premier pose le décor comme dans une situation initiale, puis les autres paragraphes racontent une succession d’actions et le dernier paragraphe présente une chute par les métaphores de la dissipation du rêveet par l’action du rêveur : « je poursuivais d’autres songes vers le réveil ». On observe ainsi une composition qui suit un déroulement chronologique.
Cependant, cette apparente structure dissimule des incohérences qui traduisent la nature même des rêves. On peut en effet se demander si les personnages du moine et de la jeune fille pendue ne sont pas les mêmes que Dom Augustin et Marguerite. Par…