Comment les fonctions publiques européennes

Comment les fonctions publiques européennes réagissent-elles au changement ?

Dans une moindre mesure. Les cultures politiques et juridiques ne sont pas les mêmes. D’abord, la notion de service public à la française est surtout développée en France ! Au Royaume-Uni, il y a eu une politique de privatisations très importante, ainsi qu’en Italie, en Espagne. Les réformes de l’Etat y ont étébeaucoup plus libérales et radicales qu’en France. Dans certains de ces pays, les fonctionnaires ne sont pas nécessairement de gauche – mis à part les enseignants, généralement de gauche-centre gauche. Les fonctionnaires de gestion sont majoritairement du centre-centre droit, notamment au Royaume-Uni. L’équation socio-politique française ne se retrouve pas ailleurs. Il existe également des différencesde perception de l’Europe très différentes selon les pays. Dans le cas des élites du secteur public, en France, 39% d’entre elles sont fortement européanistes ; 11% seulement au Royaume-Uni – pour eux, l’Europe n’est qu’un outil, et, à cet égard, le traité constitutionnel est une grande victoire britannique sur l’Europe franco-allemande ; 55% en Belgique ; 48% en Allemagne ; 47% en Italie ; 18%seulement en Suède. Il n’y a pas de convergence des salariés au niveau européen ni autour de l’Union européenne, ni autour du libéralisme. Quant aux questions public-privé, il existe des différences très importantes d’un pays à l’autre aussi bien entre les différents secteurs publics que dans l’écart public-privé dans ces pays.

Autre point à souligner : la satisfaction des Français à l’égard deleurs services publics. Les Français font partie de ceux qui sont le plus satisfaits de leur service public. A l’inverse, on note une très grande insatisfaction des usagers au Royaume-Uni, par exemple, où l’on a pratiqué des privatisations féroces. Ce n’est pas parce qu’on les a transformés en clients qu’ils sont contents. C’est un argument fort des tenants du Non. Il ne faut pas s’imaginer que lesprivatisations ou libéralisations vont entraîner des bénéfices partout ! Cela étant, il faut faire attention à la situation de chacun des pays. Ainsi, au Portugal, en matière de télécommunications, la privatisation du secteur des télécoms est bien vécue. Et les bienfaits en incombent à la libéralisation économique européenne. Là encore, il n’y a pas de convergence européenne en la matière. Dansl’ensemble, au niveau européen, il n’y a pas de demande de libéralisme de la part des salariés, du privé comme du public. On assiste peut-être là à une belle occasion d’explication ratée de la part des tenants du Non. Les salariés ne sont pas du tout pro-libéraux. Dans la plupart des pays, les salariés, public ou privé, sont majoritaires pour qu’on fasse une péréquation pour qu’il y ait un minimum desolidarité. Cette demande sociale est effective dans tous les pays européens. Or il n’y a pas de politique sociale européenne. C’est sur cette base que les tenants du Non peuvent appuyer leur argumentaire le plus valide. La Constitution s’inscrit dans une logique libérale, mais rien n’interdisait pas qu’elle s’inscrive dans une logique sociale de solidarité. Or la solidarité n’apparaît absolumentpas dans la Constitution.

L’électorat du PS est en grande majorité constitué par les salariés du secteur public. Etant donné la position officielle du PS favorable au oui, assiste-t-on à une coupure entre le parti et sa principale base électorale ?

Le Parti socialiste joue gros en terme électoral. Dès le premier tour de la présidentielle de 2002, on assistait déjà à une fuite du noyau dur del’électorat du Parti socialiste au profit de l’extrême gauche (environ 12% des salariés du secteur public) et de l’abstention. Il n’est pas interdit de penser que si le Non l’emporte le Parti socialiste aille vers une forme d’éclatement. A ceci s’ajoute le contentieux très fort des fonctionnaires et des agents du service public à l’égard du Parti socialiste sur un certain nombre de sujets….